97ième versement financier pour TEPCo

TEPCo annonce avoir reçu le 97ème versement financier de la part de la structure gouvernementale de soutien qui lui avance de l’argent pour les indemnisations : 28,6 milliards de yens (240 millions d’euros au cours actuel). Rappelons que cet argent est prêté sans intérêt.

En prenant en compte ce versement et les 188,9 milliards de yens venant de l’Act on Contract for Indemnification of Nuclear Damage Compensation, TEPCo a déjà reçu un total de 9 368,7 milliards de yens (78,7 milliards d’euros au cours actuel), en incluant le présent versement et cela ne suffira pas.

Le communiqué de TEPCo est accompagné d’un tableau avec les sommes versées au titre des indemnisations, mais sans explications. Le total s’élève à 9 331,4 milliards de yens (78,4 milliards d’euros).

Plus d’interdiction de pêche en mer à Fukushima

Les autorités japonaises ont levé les dernières restrictions concernant la pêche en mer au large de Fukushima, au-delà d’un rayon de 20 km de la centrale nucléaire accidentée. Comme les sédiments retiennent le césium, certains poissons plats, qui vivent au fond, ne pouvaient pas être mis sur le marché. Un spécimen avait dépassé la limite de 100 Bq/kg en janvier 2019. Cela ne s’est pas reproduit depuis.

Pour rappel, les concentrations maximales admissibles introduites par les autorités japonaises sont ici en anglais. Elles avaient été abaissées le 1er avril 2012.

Des restrictions demeurent sur des poissons de rivière et de lac (liste en japonais), ainsi que sur des produits agricoles, de la cueillette et de la chasse (liste en japonais).

Confirmation de l’autorisation de remise en service d’Onagawa-2

En novembre 2019, l’Autorité de régulation nucléaire avait indiqué vouloir autoriser la remise en service du réacteur n°2 de la centrale d’Onagawa située dans la province de Miyagi. Il ne restait plus qu’à soumettre cet avis à la consultation du public sur Internet.

Après la consultation, l’Autorité de régulation nucléaire a maintenu son avis : Onagawa-2 satisfait au nouveau référentiel de sûreté mis en place après la catastrophe nucléaire. Pourtant, le plus grand nombre des 979 avis déposés, s’opposaient à la remise en service du réacteur. La demande avait été déposée en décembre 2013.

C’est le 16ième réacteur à voir sa remise en service validée. Mais seuls 9 ont été remis en service depuis 2011, et aucun en 2019. Le nucléaire japonais est bloqué.

La remise en service n’est pas pour tout de suite, car cette centrale a subi les séismes et tsunami de 2011. Il reste, notamment, à mur à terminer le long du littoral. La compagnie espère terminer les travaux de renforcement de la sûreté pour mars 2021.

Il s’agit d’un réacteur à eau bouillante, comme ceux de la centrale de Fukushima daï-ichi.

TEPCo une nouvelle fois condamnée à indemniser des “auto-évacuées” de la catastrophe nucléaire

En avril 2016, 52 personnes ont saisi la justice pour être mieux indemnisées suite à la catastrophe nucléaire. Elles sont toutes originaires de zones où il n’y a pas eu d’ordre d’évacuer. Ils réclamaient un total de 99 millions de yens (820 000€) pour la souffrance psychologique qui a suivi leur évacuation spontanée et la crainte d’avoir été exposés aux retombées radioactives.

De nombreuses personnes ont d’abord saisi la commission de conciliation mise en place par le gouvernement pour traiter les demandes d’indemnisation. Mais TEPCo ayant refusé d’appliquer les recommandations de cette commission, les victimes se sont retouvées dans une impasse. Le dossier est remonté jusqu’au parlement et le ministre de l’industrie a demander à la compagnie d’être plus compréhensive, en vain. Elle ne veut pas se départir des règles fixées par le gouvernement, afin de limiter le coût des indemnisations, qui s’élève déjà à plus de 9 321 milliards de yens (77 milliards d’euros). Le gouvernement, actionnaire majoritaire, a les moyens de faire céder TEPCo, mais il ne semble pas prêt à cela, car c’est lui qui avance l’argent…

Dans le cas présent, un groupe de victimes a saisi la justice pour obtenir réparation. Selon l’Asahi, la cour a aussi tenté de trouver un compromis en décembre dernier, mais TEPCo a encore refusé. Elle vient donc de condamner la compagnie à payer 12,03 millions de yens (100 000 €) à 50 des 52 plaignants. Le juge a reconnu que les personnes qui sont parties étaient stressées à cause d’une situation incertaine et l’absence de perspectives pour leur avenir. Quant à celles qui sont restées, elles ne pouvaient pas se déplacer librement à cause de la crainte des radiations.

La cour a donc demandé à TEPCo de verser entre 22 000 (182€) et 286 000 yens (2 400 €) à chaque plaignant éligible, en plus des 120 000 yens (1 000 €) déjà reçus suivant la procédure normale.

Shikoku Electric fait finalement appel de la décision de justice qui suspend son réacteur Ikata-3

Shikoku Electric, qui a vu la justice suspendre une deuxième fois le réacteur n°3 de sa centrale nucléaire d’Ikata (à Ehimé) le 17 janvier dernier, a finalement décidé de faire appel. Elle avait reporté cette décision suite aux multiples problèmes survenus dans ce réacteur, dont une coupure généralisée de l’électricité pendant une dizaine de secondes.

Un autre juge de la même cour devrait être saisi du dossier.

Ikata-3 avait été remis en service en 2016. Il est à l’arrêt pour maintenance depuis le 26 décembre 2019 et il aurait dû redémarrer en avril 2020.

Japan Atomic Power Co accusée de falsifier les données sismiques

L’Autorité de régulation nucléaire (NRA) a accusé la Japan Atomic Power Co (JAPCo) d’avoir modifié les données sismiques utilisées pour déterminer si la faille qui passe sous sa centrale de Tsuruga, dans la province de Fukui, est active ou pas.

Le groupe d’experts de la NRA avait conclu, en mai 2013, que la faille qui passe sous la centrale de Tsuruga est active, ce qui interdit son exploitation. Cet avis avait été confirmé en novembre 2014, malgré les nouvelles données transmises par l’exploitant. Ce dernier ne veut pas admettre les faits et une demande de remise en service du réacteur n°2 a été déposée en novembre 2015. Le réacteur n°1 a été arrêté définitivement en mars 2015.

De nouvelles investigations géologiques ont été menées par l’exploitant et la NRA s’est aperçue que qu’une partie des données transmises le 7 février dernier avait été effacée et remplacée. Une telle attitude est inacceptable ! La compagnie a expliqué avoir remplacé des données anciennes par des données plus récentes, mais cela n’a pas convaincu la NRA qui lui demandé de lui transmettre toutes les données originales et de pointer toutes les modifications faites.

Dernières données relatives au dépistage du cancer de la thyroïde à Fukushima : nouveaux cas

Les autorités régionales de Fukushima ont mis en ligne les derniers résultats à la date du 30 septembre 2019 de leur campagne de dépistage du cancer de la thyroïde chez les jeunes de la province. Il s’agit du 37ième rapport. Les résultats détaillés sont ici en japonais. Une traduction officielle en anglais des principales données devrait être bientôt disponible et le blog Fukushima voices propose son propre résumé en anglais.

Les données publiées lors du 36ième rapport sont ici, à titre de comparaison.

Avec un dépistage tous les deux ans par échographie, les jeunes de moins de 18 ans qui participent en sont déjà à leur 4ième examen médical. Après 18 ans, le dépistage suivant se fait à l’âge de 25 ans. Les autorités japonaises préparent la cinquième campagne de dépistage. Pour cela, elles ont préparé un document explicatif rappelant les avantages et les inconvénients du dépistage et le choix laissé aux familles.

Les résultats présentés lors de cette 37ième session sont à la date du 30 septembre 2019. Ils sont résumés dans ce document en japonais. Il n’y a pas de changement relatif aux deux premières campagnes de dépistage.

La troisième campagne de dépistage a commencé le 1er mai 2016. Les derniers résultats détaillés font apparaître 1 cas supplémentaire de cancer de la thyroïde suspecté et 5 cas confirmés en plus, par rapport à la dernière fois. Voir le tableau ci-dessous pour plus de détail.

La quatrième campagne de dépistage, dont les résultats détaillés sont ici, fait apparaître 3 cas supplémentaires suspectés et 7 cas supplémentaires confirmés par chirurgie. Voir tableau.

Enfin, pour les plus de 25 ans, les données ont été mises à jour. Il y a 2 cas supplémentaires parmi les cancers suspectés. Un seul a subi une intervention chirurgicale, comme la dernière fois.

On arrive donc à un total de 237 cas de cancers de la thyroïde suspectés chez les jeunes de Fukushima, dont 186 ont été confirmés lors d’une intervention chirurgicale. Il n’y a toujours qu’un seul cas qui s’est révélé être bénin après l’intervention (première campagne).

Dépistages avec résultat Examens complémentaires terminés Cytoponctions Nombre de cancers suspectés Nombre de cancers confirmés
Première campagne 300 472 2 091 547 116 101
Deuxième campagne 270 540 1 826 207 71 52
Troisième campagne 217 904 1 050 74 30 24
Quatrième campagne 125 491 418 29 16 8
Plus de 25 ans 4 239 127 10 4 1

Rappelons que, selon le fond de soutien des enfants ayant un cancer de la thyroïde, créé en 2016, il y aurait au moins 17 cas supplémentaires, non pris en compte dans les données officielles : 16 d’entre eux auraient été diagnostiqués lors de contrôles effectués par les parents en dehors de la province de Fukushima, et un cas avait déjà oublié par le passé. L’un d’entre eux avait moins de 5 ans au moment de la catastrophe nucléaire. Evidemment, il y a probablement d’autres cas non recensés.

A ces chiffres, on peut ajouter les 4 cas découverts à Marumori, au Sud de la province voisine de Miyagi.

Gestion des risques en situation post-accidentelle d’un accident nucléaire : le Codirpa tente de prendre en compte l’accident grave

Bien avant la catastrophe de Fukushima, les autorités françaises avaient lancé le comité directeur pour la gestion post-accidentelle d’un accident nucléaire (CODIRPA) qui a abouti, en novembre 2012, à l’élaboration d’éléments constitutifs d’une première doctrine nationale pour la gestion post-accidentelle d’un accident nucléaire d’ampleur moyenne entraînant des rejets de courte durée (moins de 24 heures). Voir la page officielle.

Depuis, les travaux de ce groupe ont continué afin de prendre en compte un accident plus grave que celui qui a servi de référence à la première phase (voir les comptes-rendus des réunions). L’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) vient de communiquer sur l’évolution de la doctrine, suite à ces travaux et de mettre en ligne une note technique (lien direct, copie). Pour rappel, la phase post-accidentelle vient juste après la phase d’urgence, qui est encadrée par le Plan national de réponse à un accident radiologique majeur, au niveau national, et les Plans particuliers d’Intervention (PPI) au niveau local.

En phase post-accidentelle, les deux principales mesures de protection des populations sont le déplacement pour les personnes originaires des territoires les plus contaminés et les restrictions alimentaires.

Dans son communiqué, l’ASN explique : “Pour protéger la population du risque d’exposition externe, il est proposé de maintenir le périmètre d’éloignement des populations (zone non habitable), sur la base d’une valeur de dose efficace annuelle de 20 mSv/an pour la première année. La consommation et la vente des denrées produites localement seraient interdites dans cette zone.” Elle ne dit rien pour les années ultérieures. Ce niveau de référence de 20 mSv pour la première année résulte de la transposition d’une directive européenne dans la réglementation française (décret n° 2018-434 du 4 juin 2018).

La limite en temps normal est de 1 mSv/an. Cette valeur de 20 mSv pour la première année, pour la seule exposition externe, n’est pas acceptée par tous. En effet, elle correspond à la limite pour les travailleurs du nucléaire et serait appliquée, en cas d’accident grave, aux enfants et aux bébés. A Fukushima, où la même limite a été retenue, de nombreuses familles sont parties, même si elles n’étaient pas en zone d’évacuation. Les autorités françaises devraient introduire des niveaux plus protecteurs pour les plus jeunes. Que ce soit au niveau français, lors de consultation qui a précédé la transposition de la directive européenne, ou au niveau international, lors de la consultation de la CIPR, l’ACRO milite depuis des années pour l’introduction d’objectifs à long terme, à l’instar de ce qui se fait aux Etats-Unis où les directives requièrent le déplacement quand les personnes peuvent être exposées à 20 mSv ou plus durant la première année, et 5 mSv ou moins à partir de la seconde année. L’objectif à long terme est de maintenir les doses à ou en dessous de 50 mSv en 50 ans, afin de retouver un 1 mSv/an en moyenne.

Pour ce qui concerne la restriction de consommation des aliments contaminés, le Codirpa propose d’abandonner les concepts de zone de protection des populations (ZPP) et de zone de surveillance renforcée du territoire (ZST), tels qu’ils avaient été définis dans les éléments de doctrine publiés en 2012. A la place, elle propose “un périmètre de non consommation des denrées fraîches locales” et “une approche territorialisée par filière de production agricole et d’élevage” au-delà. En revanche, le Codirpa ne parle jamais de l’eau potable, qui est pourtant à risque en cas d’accident grave sur une centrale au bord d’un fleuve, comme l’a révélé l’ACRO en juillet 2019.

Le Codirpa évoque la mise en place d’une surveillance des productions agricoles et des élevages en tenant compte notamment des niveaux maximaux admissibles (NMA) européens. Or, le plan national d’urgence explique (voir notre fiche dédiée à la contamination de l’alimentation) qu'”une gestion du risque alimentaire élaborée uniquement sur une comparaison aux NMA ne serait appropriée que pour les populations nationales vivant à distance du site accidenté. En effet, plus les populations à protéger seraient proches du site accidenté et plus la proportion de denrées contaminées issues de circuits de commercialisation courts pourrait être importante. La part des autres voies d’exposition, notamment l’irradiation externe, serait également croissante. Ces considérations ont amené le CODIR-PA à proposer une démarche plus globale pour la gestion du risque alimentaire au niveau national à la suite d’un accident.” La disparition des ZPP et ZST signifie-t-elle la fin de la gestion différenciée des niveaux maximaux admissibles ? Il n’y a rien à ce propos dans la nouvelle doctrine.

Par ailleurs, “ainsi que le Codirpa l’avait souligné en 2012, l’implication des parties prenantes, et notamment des personnes « victimes » de l’accident et des élus, dans les processus de décision, dès le début de la phase post-accidentelle, constitue une condition nécessaire pour la reprise progressive des activités dans les zones affectées par les rejets.” Pas seulement. Les personnes déplacées qui ne souhaitent ou ne peuvent pas rentrer doivent aussi être impliquées ! La notion d’implication n’est pas explicitée. Est-ce réduit à l’implication dans la mesure de la radioactivité ou est-ce que cela va jusqu’aux prises de décision ? Aucun progrès n’a semble-t-il été fait depuis sur ce sujet crucial de l’implication des acteurs.

Pour finir, le Codirpa liste, dans sa note (lien direct, copie), des pistes de travail complémentaire qui n’en sont encore qu’au stade de la préparation. Concernant la mise en œuvre du périmètre d’éloignement, il est question de définir avec les parties prenantes des indicateurs facilement mesurables pour mesurer la contamination dans l’environnement, mais pas d’implication décisionnelle. Il est aussi question d’examiner “les conditions d’un retour ponctuel ou définitif des populations éloignées”, mais pas de la réinstallation ailleurs des personnes déplacées.

La population n’est vue que comme un acteur de la gestion post-accidentelle et de sa propre protection, mais pas comme un acteur mature participant aux décisions. Les populations n’ont pas été associées aux plans d’urgence national et locaux. Comment croire qu’elles seraient associées après un accident ?

La liste des pistes de travail complémentaire n’est, malheureusement, pas complète. Par exemple, les annimaux de fermes ne sont pas pris en considération, si ce n’est sous le volet alimentaire.

Fausses nouvelles et vrais mensonges sur Fukushima

Le Blog de Fukushima vient de publier une série en trois épisodes sur les nombreuses infox relatives à l’accident de Fukushima. Il s’agit d’un gros travail, très utile.

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