Le débat fait rage au Japon à propos de la centrale nucléaire de Sendaï située dans la province de Kagoshima à quelque 120 km des épicentres des forts séismes qui ont eu lieu ces derniers jours. Faut-il arrêter les deux seuls réacteurs nucléaires en activité du pays ?
Le gouvernement est contre l’arrêt, bien évidemment. Le village nucléaire a eu tellement de mal à redémarrer deux réacteurs qu’il ne veut pas les arrêter. Quand pourraient-ils repartir ? Rappelons qu’il y avait 54 réacteurs nucléaires avant la catastrophe de Fukushima et que seulement 5 satisfont aux nouveaux critères de sûreté qui ont notamment renforcé les critères de résistance aux séismes. D’un autre côté, 12 réacteurs ont été arrêtés définitivement, en incluant les quatre détruits à Fukushima daï-ichi.
D’un autre côté, l’activité sismique reste intense : le nombre de répliques qui ont dépassé la magnitude 1 sur l’échelle japonaise, qui va de 0 à 7, est 531 à 12h, heure locale, dont plus de 80 avec une magnitude supérieure à 4. Ce matin, entre minuit et 11h, il y a eu 3 secousses d’une magnitude supérieure à 4 dans la province de Kumamoto, la plus touchée. Le 17 avril, la province voisine d’Ôïta a subi 5 secousses d’une intensité supérieure à 3. La question cruciale est de savoir si cette activité sismique va s’étendre à d’autres failles.
Les secousses au niveau de la centrale de Sendaï sont restées relativement modestes, comme nous l’avons signalé. Mais que se passera-t-il si l’activité sismique se propage vers le Sud-Est, en direction de la centrale de Sendaï ? Un grand nombre de personnes demandent donc l’arrêt préventif des réacteurs. Plusieurs pétitions circulent (voir ici par exemple).
Face à la polémique, l’Autorité de Régulation Nucléaire (NRA) a fini par tenir une réunion exceptionnelle à ce propos. Son président a présenté ses excuses pour l’absence d’informations relatives à la centrale. Il a aussi confirmé qu’il n’y a, pour le moment, aucun problème de sûreté. Les accélérations maximales enregistrées lors des secousses étaient de 8,6 gal à Sendaï, 20,3 gal à Genkaï, centrale arrêtée dans la province de Saga sur l’île de Kyûshû également et 10 gal pour celle d’Ikata, dans la province d’Ehimé sur l’île voisine de Shikoku, aussi à l’arrêt. Le refroidissement des piscines n’y a pas été affecté. L’arrêt automatique des réacteurs a lieu quand les accélérations horizontales atteignent de 140 à 190 gal (c’est 160 gal à Sendaï) et 70 à 90 gal verticalement. Le gal correspond à 1 cm/s2.
La NRA a aussi précisé que le niveau d’alerte du volcan Aso n’avait pas été relevé. Elle estime, de plus, que si l’activité sismique se propage vers la centrale de Sendaï, les mesures de sûreté prévues seront suffisantes. Ce point de vue de la NRA n’est pas une surprise. Demander l’arrêt des réacteurs de Sendaï signifierait que le référentiel de sûreté mis en place après la catastrophe de Fukushima n’est pas assez contraignant… Or, il a été présenté comme le plus exigent au monde !
Mais la dégradation des moyens de transport et le fait que les secours soient débordés par le nombre de personnes réfugiées à Kumamoto (104 900 ce matin), avec des difficultés dans approvisionnement en nourriture, font qu’en cas d’accident nucléaire grave, les plans d’urgence ne pourront pas être appliqués de manière satisfaisante. En particulier, l’évacuation sera complexe à mettre en œuvre. Ces plans d’urgence constituent pourtant le cinquième niveau de protection dans la doctrine de la défense en profondeur.
Autrement, le nombre de décès liés au séisme est désormais de 44. Il y a près de 100 000 personnes sans logement et les abris sont surpeuplés. Des milliers de personnes dorment dans leur voiture.
A 8h42, ce soir, heure locale, un nouveau séisme de magnitude 5,8 a frappé la province de Kumamoto. Une secousse supérieure à 5 sur l’échelle japonaise qui compte 5 niveau a été ressentie au mont Aso, à Ubuyama (Kumamoto) et à Taketa (Ôïta). Une fois encore l’épicentre est à 10 km de profondeur.
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