La démolition des maisons endommagées par la triple catastrophe n’avance pas

Le gouvernement prend en charge la démolition des habitations endommagées par la triple catastrophe, mais, à Fukushima, 70% des demandes n’ont toujours pas abouti. Selon le Fukushima Minpo, repris par le Japan Times, au 8 janvier 2016, il y avait 7 670 demandes à Fukushima.

A Minami-Sôma, où l’ordre d’évacuer devrait être levé cette année, il y a 2 600 demandes mais il reste 1 780 habitations à détruire. A Kawamata la démolition est terminée pour 17% des habitations et 6% à Katsurao. Pour ces deux communes, il est question de lever l’ordre d’évacuer en avril prochain.

A Tamura et Kawauchi, où les ordres d’évacuation ont été levés partiellement en 2014, les travaux de démolition sont terminés.

Sont éligibles, les maisons directement abimées par les séisme et tsunami, mais aussi celles qui se sont détériorées suite à des fuites du toit qui n’ont pas pu être réparées à cause de l’évacuation. L’extension de la prise en charge à cette dernière cause a augmenté significativement le nombre de demandes. La prise en charge administrative a pris du retard. Il y a aussi un manque de main d’œuvre pour faire le travail.

Ce problème de manque de main d’œuvre est un problème général dans les régions du Tôhoku touchées par le séisme et le tsunami.

TEPCo refuse toujours de rembourser de l’ordre de 20 milliards de yens aux six provinces de Tôhoku

Nous avions déjà mentionné que TEPCo rechignait à rembourser de nombreuses dépenses liées à la catastrophe aux provinces et communes touchées. Le Yomiuri refait le point pour les 6 provinces du Tôhoku.

La somme réclamée par ces six provinces est de 53,1 milliards de yens (420 millions d’euros) et TEPCo refuse de prendre en charge 20,1 milliards de yens (160 millions d’euros) sur cette somme. Elles ont déposé des appels à la commission de conciliation, à l’instar de celles de Fukushima.

Les lignes directrices listent toute une liste de postes qui peuvent bénéficier d’une prise en charge par TEPCo, comme la contamination des stations d’épuration. Ces lignes spécifient qu’en “fonction des circonstances, des dépenses supplémentaires peuvent être reconnues comme éligibles à un remboursement”.

Fukushima a demandé 37,1 milliards de yens et obtenu 20,9 milliards. TEPCo ne veut pas prendre en charge les salaires des employés territoriaux du nouveau département en charge de la gestion de la catastrophe ni les campagnes de publicité pour relancer le tourisme.

La province voisine de Yamagata qui accueille de nombreuses personnes déplacées a reçu un soutien pour ce qui concerne la contamination des produits agricoles et l’embauche de nouveaux enseignants, mais cela ne couvre qu’un tiers des sommes demandées.

Les province d’Akita et d’Aomori se sont vues refuser 80 à 90% de leurs demandes comme des campagnes de promotion du tourisme et l’achat de matériel de détection de la radioactivité.

Fukushima : addiction à l’argent du nucléaire

Les communes qui entourent les centrales nucléaires et les provinces qui les abritent dépendent financièrement de cette industrie. Au Japon, où les compagnies d’électricité bénéficiaient d’un monopole local, elles pouvaient imposer des tarifs élevés et redistribuer de l’argent à tout le monde pour maintenir le statu quo.

A Fukushima, même après la catastrophe nucléaire, les communes affectées ont besoin des subsides de la compagnie honnie. Il y a environ 7 000 personnes qui travaillent quotidiennement à la centrale accidentée, auxquelles il faut ajouter celles de la centrale de Fukushima daï-ni qui n’a pas encore été arrêtée définitivement. Avec la décontamination, ce sont presque les seuls emplois disponibles dans les territoires évacués.

A Naraha, où l’ordre d’évacuer a été levé le 5 septembre 2015, la Japan Atomic Energy Agency a installé un centre de test pour les robots engagés dans le démantèlement. Un centre de recherche est prévu à Tomioka. A Ôkuma, commune dont la majeure partie est classée en “zone de retour difficile”, TEPCo a construit une unité de production de 2 000 repas par jour pour les travailleurs. La compagnie veut aussi installer des dortoirs pouvant accueillir 750 travailleurs. Le siège du département de “revitalisation” de TEPCo va aussi être installé à Tomioka.

Toutes ces communes n’ont pas d’alternative pour relancer leur économie. Outre le maintien d’une dépendance envers TEPCo, ce n’est pas sans poser de problème dans l’immédiat : à Naraha, il y a environ 1 300 travailleurs, qui y résident. C’est 3 fois plus que le nombre d’habitants qui sont rentrés. A Hirono, il y maintenant deux fois plus d’hommes que de femmes.

Au-delà, une partie de l’économie est encore dépendante des indemnisations de TEPCo. C’est le cas, en particulier, de l’agriculture et de la pêche, du tourisme…

D’un autre côté, bien que nationalisée, la santé économique de TEPCo reste très fragile. L’ouverture complète du marché de l’électricité à partir du 1er avril 2016 va entraîner une baisse de revenu.

Polémiques autour des plans d’urgence nucléaire au Japon

SPEEDI

SPEEDI est un code informatique destiné à prédire les retombées radioactives lors d’un accident nucléaire. Lors de la catastrophe de Fukushima, la quantité de radioéléments rejetés étant inconnue, ses prédictions n’ont pas servi à la gestion de l’urgence. Seules la direction des retombées étaient connues, pas leur quantité. Et les pouvoirs locaux en charge de l’évacuation n’avaient jamais eu accès aux maigres résultats obtenus. L’Autorité de Régulation Nucléaire, la NRA, a décidé de ne pas l’utiliser en cas de nouvel accident.

Mais le gouvernement vient d’accepter, à la demande des gouverneurs, que les autorités locales puissent utiliser SPEEDI en cas d’accident pour encadrer les évacuations. On se souvient qu’en 2011, des habitants de Namié avaient été évacués vers une zone plus exposée aux retombées radioactives que leur lieu d’origine. D’où la demande de pouvoir utiliser SPEEDI.

Cette divergence entre la NRA et les autorités locales pourrait conduire à des décisions contradictoires et à de la confusion pour les personnes concernées. Le gouvernement doit donc clarifier les rôles de chacun. Il compte ne pas faire obstruction aux décisions locales prises en se basant sur SPEEDI. C’est aussi, pour lui, une façon de se décharger de ses responsabilités. Qui fera tourner SPEEDI ? Les autorités locales ou la Japan Atomic Energy Agency, l’équivalent du CEA ? ce n’est pas encore décidé.

Ce logiciel, développé après l’accident de Three Mile Island, a coûté près de 12,4 milliards de yens (près de 100 millions d’euros).

Le gouvernement a aussi décidé que les autorités locales pourront distribuer des comprimés d’iode jusqu’à 30 km des centrales nucléaires et qu’il prendra en charge les coûts. Pour le moment, c’est seulement 5 km ! En France et en Suisse, ce sont les exploitants du nucléaire qui payent. En 2011, il aurait fallu prendre de l’iode jusqu’à 50 km.

Rôle de l’armée et des pompiers

En ce qui concerne l’armée, appelée “forces d’auto-défense” et les pompiers qui étaient intervenus durant les premiers jours de la catastrophe à la demande du premier ministre, il n’y a toujours pas de politique de définie. Le gouvernement, l’Autorité de Régulation Nucléaire (NRA), l’armée et les pompiers ont des avis qui diffèrent.

Un responsable du ministère de la défense explique que le Japon ayant désormais les règles de sûreté les plus stricts au monde, les exploitants sont bien préparés à faire face à l’urgence nucléaire et que l’armée ne pourrait pas faire mieux. A l’occasion du cinquième anniversaire de la catastrophe, le gouvernement a affirmé, dans un rapport, prendre la responsabilité de la gestion d’un accident nucléaire. Ce rapport fait référence à des escadrons de militaires et de pompiers qui participeront au transport de matériel et à d’autres efforts. La délimitation de leurs tâches n’est pas précisée. Il n’est officiellement question que d’assistance. La limite de dose de 250 mSv qui deviendra la norme en cas d’urgence nucléaire à partir du 1er avril prochain ne s’applique qu’aux travailleurs du nucléaire et aux inspecteurs de la NRA. Aucune limite n’est définie pour les militaires et pompiers.

Les pompiers, sont tout aussi réticents à intervenir en cas d’accident nucléaire. Les nouvelles règles de sûreté imposent le pré-positionnement de camions de pompier et les exploitants doivent pouvoir s’en servir sans intervention extérieure.

Enfin, la NRA précise que si l’exploitant est dépassé par les évènements, des troupes sous responsabilité gouvernementale pourraient être envoyées sur place en recours ultime.

A Fukushima

Les communes situées à moins de 30 km des centrales nucléaires doivent aussi élaborer des plans d’évacuation. C’est aussi le cas pour celles situées autour de Fukushima daï-ichi et daï-ni. A Namié, commune de 18 700 habitants encore complètement évacuée, la mairie a décidé que les habitants pourront partir même si le risque d’exposition est inférieur au seuil de déclenchement de l’évacuation défini au niveau national, qui est de 500 microsieverts par heure. Mais en 2011, ce seuil n’avait jamais été atteint au-delà de 5 km. Les communes ont quand même été évacuées. La habitants doivent aussi partir au bout d’une semaine si l’exposition dépasse 20 microsieverts par heure pendant plus de 24h.

La ville voisine de Minami-Sôma a pris une décision similaire en 2013. Cela n’est pas du goût du gouvernement car cela pourrait engorger les routes en cas d’urgence et entraver l’évacuation des zones les plus exposées. Lors de la catastrophe de Fukushima, toutes les routes autour de Namié étaient congestionnées et les abris ne pouvaient pas accueillir tout le monde.

En 2011, seules les communes situées à moins de 5 km d’une centrale nucléaire devaient prévoir des plans d’évacuation. Ni Namié, ni Minami-Sôma n’étaient donc concernées. Namié a pourtant été évacuée et un ordre de mise à l’abri a affecté Minami-Sôma. Près de 55 000 personnes sur 70 000 étaient parties d’elles-mêmes.

Le maire de Namié estime que les habitants partiront de nouveau d’eux mêmes et qu’il vaut mieux prévoir une limite plus basse afin de fluidifier le trafic.

Sur tout le Japon, 135 communes doivent élaborer des plans d’évacuation et 95 d’entre elles l’ont fait. A Ibaraki et Shizuoka, il est difficile de trouver des abris pour tout le monde car il y a près d’un million d’habitants dans un rayon de 30 km. Un responsable d’Ibaraki estime que les lignes directrices du gouvernement ne sont que de la théorie sur le papier. “Plus on travaille sur les plans d’urgence, moins ils sont réalistes.”

Des balises de mesure de la radioactivité limitées

Autour de la centrale de Sendaï, dans la province de Kagoshima, qui a deux réacteurs nucléaires en activité, il y a 48 balises de mesure de la radioactivité ambiante pour donner l’alerte en cas d’accident et aider à la décision pour l’évacuation. Mais 22 d’entre eux ne peuvent pas mesurer des niveaux supérieurs à 80 microsieverts par heure alors que le seuil d’évacuation est de 500 ! Pas de problème, déclare un représentant de la province à l’Asahi, car il y a aussi des postes de mesure mobiles. Mais 30 de ces 44 appareils mobiles ne peuvent pas mesurer des niveaux supérieurs à 100 microsieverts par heure !

Autour de la centrale de Takahama, où deux réacteurs auraient dû redémarrer sans une décision de justice, les autorités régionales de Kyôto ont prévu d’installer 41 balises mais il n’y en a que 14. Il y a encore des délibérations à propos de l’emplacement…

187ième manifestation anti-nucléaire devant la résidence du premier ministre

En ce jour anniversaire de la catastrophe nucléaire de Fukushima, la manifestation anti-nucléaire du vendredi soir a rassemblé quelques 6 000 personnes. L’ancien premier ministre Koïzumi était présent.

Il s’agit de la 187ième manifestation hebdomadaire. Il n’y a plus l’affluence des premières semaines, même si l’opposition à l’énergie nucléaire reste forte au Japon : moins d’un millier de personnes en février 2016. Il y a de la résignation car le gouvernement actuel ne changera pas de politique.

Ce week-end, ils étaient aussi un millier à défiler pour demander l’arrêt du nucléaire à Ôsaka dans le Kansaï et environ 6 000 à Kôriyama dans la province de Fukushima, à réclamer l’arrêt définitif de Fukushima daï-ni.

Quel avenir pour les zones dites de “retour difficile” ?

En 2012, le gouvernement a redessiné les territoires évacués en trois zones en fonction du débit de dose ambiant. Pour la partie la plus contaminée, là où l’exposition externe peut dépasser 50 mSv par an, classée en zone de “retour difficile”, le gouvernement avait annoncé qu’il n’y aurait pas de retour possible avant cinq années. Quel avenir pour ces territoires après 2017 ?

Une consultation des élus locaux va avoir lieu pour définir les parties à décontaminer en priorité, sachant que par endroits, le débit de dose est encore bien trop élevé. Le but est de réduire la zone dite de “retour difficile”, pas de l’éliminer. Il y a, en particulier, les 16 km2 prévus pour le centre d’entreposage des déchets radioactifs tout autour de la centrale de Fukushima daï-ichi où le retour ne sera pas possible avant des décennies.

Pour le moment, aucune décontamination n’a eu lieu dans cette zone de retour difficile, mis à part quelques chantiers test à l’automne 2013 où le débit de dose moyen est passé de 18,7 microsieverts par heure à 6,44. C’est encore trop élevé pour pouvoir lever l’ordre d’évacuer. Mais en décembre 2015, il était de 3,52 microsievert par heure.

Cette absence de décision pour ces territoires les plus contaminés est préjudiciable aux anciens résidents qui ne savent pas quel sera leur avenir. C’est le cas, par exemple, pour le district de Nagadoro dans la commune d’Iitaté où il y avait 270 habitants avant la catastrophe. Selon le Maïnichi, lors d’une réunion qui a eu lieu en novembre 2014, les habitants n’ont pas réussi à s’entendre. Une enquête effectuée en 2014 par l’agence de reconstruction a montré que seulement 13% d’entre eux souhaitaient rentrer, contre 29,4% pour le village entier, et 50,7% ont dit ne pas vouloir rentrer, contre 26,5% pour le village. Les habitants qui veulent rentrer souhaitent le déclassement de la zone de retour difficile alors que ceux qui ne le veulent pas craignent que ce déclassement entraîne une moins bonne prise en charge. L’indemnisation a déjà été versée et ne va pas être reprise. En revanche, la couverture sociale a diminué là où l’ordre d’évacuer a été levé.

L’exploitation des travailleurs engagés dans la décontamination

L’agence Associated Press (AP) consacre un long article aux travailleurs, souvent à la marge, qui triment sur les chantiers de décontamination. Ils sont près de 26 000 et les violations du droit du travail y sont fréquentes, comme nous l’avons déjà rapporté.

Tout en bas de l’échelle sociale, exploités par un système pyramidal de sous-traitance, ils sont souvent mal vus par les résidents locaux et le gouvernement ne contrôle pas les doses qu’ils prennent. Ils vivent souvent dans des baraques et enchaînent les CDD. Leur précarité les fragilise. Certains (re)deviendront SDF à la fin du contrat car ils sont sans attache ni famille.

L’article cite l’exemple d’un travailleur qui a eu du mal à retrouver du travail après s’être battu pour toucher la prime de risque qui doit lui revenir. Certaines compagnies ont cependant été condamnées.

Ils sont quelques 8 000 à Minami-Sôma et leur lieu de résidence apparaît comme un ghetto pour beaucoup d’habitants intimidés. Les magasins ou bars qu’ils fréquentent sont boudés par es autres habitants. Il est difficile d’enquêter sur eux car ils n’ont pas le droit de parler aux médias. Les journalistes de l’AP ont reçu un coup de fil d’un responsable de la mairie leur demandant de ne pas leur parler.

Cette précarité est à l’origine d’une santé dégradée, certains n’ayant pas les moyens de se payer les soins nécessaires. Plusieurs sont décédés sans attache ni famille. Leurs cendres sont recueillies dans un temple bouddhiste de Minami-Sôma avec la mention “troupe de décontamination”.

Création d’une association de familles avec un enfant ayant un cancer de la thyroïde

Des familles ayant un enfant ayant un cancer de la thyroïde découvert après la catastrophe de Fukushima se sont regroupées en association. Il y a cinq familles qui appellent d’autres à les rejoindre. Il s’agit d’une étape importante car les parents ont plutôt tendance à se cacher par crainte de la stigmatisation. « Je n’ai pu en parler à personne. Le médecin est notre seul interlocuteur, mais les visites pour les examens ne durent que 5-6 minutes et il est difficile de discuter », a témoigné à visage caché un père lors de la conférence de presse, selon l’AFP reprise par Le Point. « Nous ne savons pas du tout à qui demander conseil et, de ce fait, nous disposons de très peu d’informations sur le cancer de la thyroïde et ses conséquences », ajoute-t-il. « Pour plusieurs raisons, dont la peur des regards extérieurs, les familles se sont enfermées dans l’isolement. »

Ces familles réclament l’inversion de la charge de la preuve, à savoir un soutien sauf si l’on peut démontrer que la catastrophe n’est pas à l’origine de la maladie. « L’accident de Fukushima a entraîné des rejets massifs d’éléments radioactifs dans la nature. Nous avons été irradiés et il n’y a rien qui nous prouve à ce jour que cette catastrophe ne soit pas la cause des cancers », rapporte Le Matin.

Voir leur site internet en japonais.

Rappelons, qu’à ce jour, il y a déjà 166 cas suspectés ou confirmés et que c’est plus que ce qui est observé ailleurs et que les autorités japonaises nient le lien avec les rejets radioactifs.

Coût de l’accident: 100 milliards d’euros – TEPCo ne paye que 20% selon le FT

Le Financial Times (traduit en français par Courrier International) estime à environ 13 300 milliards de yens (100 milliards d’euros) la facture de l’accident nucléaire. TEPCo ne prendrait que 20% à sa charge. Comme le gouvernement ne donne pas d’estimation du coût de la catastrophe, le quotidien se base sur des travaux du Prof. Ken’ichi Oshima de l’université Ritsumeikan.

Ce montant comprend

  • l’indemnisation des entreprises et des personnes évacuées de la zone sinistrée : environ 6 200 milliards de yens (50 milliards d’euros),
  • la décontamination à Fukushima : 2 500 milliards de yens (28,15 milliards d’euros)
  • le démantèlement des réacteurs de la centrale : 2 200 milliards de yens (17,7 milliards d’euros).,
  • le centre d’entreposage des déchets à Fukushima : 1 100 milliards de yens.

Rappelons que ce que TEPCo paye est avancé par le gouvernement sans intérêt. Personne ne sait quand la compagnie remboursera, surtout avec l’ouverture du marché de l’électricité. Au final ce sont les contribuables et les consommateurs qui payent.

Suite à cet article du Financial Times, la presse japonaise s’est aussi intéressée aux estimations de Ken’ichi Oshima. Le Maïnichi reprend ces chiffres et explique que la Japan Atomic Energy Commission veut réduire les coûts pour les exploitants afin que le nucléaire reste rentable… Ce qui signifie une prise en charge publique.

L’agence de presse jiji, reprise par le Japan Times, rapporte que les contribuables japonais ont déjà payé plus de 3 460 milliards de yens (27 milliards d’euros). Cela inclut le coût de la nationalisation de TEPCo et les dépenses directes du gouvernement (1 210 milliards de yens). Tout n’a pas encore été compté et cette somme est donc un minimum.

Le réacteur n°3 de Takahama arrêté sur injonction de la justice

Kansaï Electric a arrêté le réacteur n°3 de sa centrale de Takahama dans la province de Fukui suite à la décision de justice. Il ne produit plus d’électricité depuis 20h alors qu’il venait tout juste d’être remis en service le 29 janvier dernier. Le réacteur n°4, quant à lui, était à l’arrêt suite à une panne lors des opérations de redémarrage.

La compagnie, qui juge cette décision inacceptable, s’apprête à faire appel. Le porte-parole du gouvernement s’est contenté de dire que la politique en la matière n’a pas changé et que le Japon a les règles de sûreté les plus strictes au monde. Cette affirmation n’a jamais été démontrée.

Pour le juge, KEPCo n’a pas bien expliqué les mesures de sûreté ni celles pour faire face à un accident. Il pense que les réacteurs ne pourront pas supporter un fort séisme et que l’estimation de la taille de la faille faite par l’exploitant n’est pas correcte. Quelles sont les mesures de protection des piscines de refroidissement des combustibles usés en cas de fissure provoquée par un tremblement de terre ? Il rappelle aussi qu’un grand tsunami a frappé la région en 1586.

Ce jugement intervient après que l’Autorité de Régulation Nucléaire (NRA) ait jugé que ces réacteurs étaient conformes aux nouvelles règles de sûreté. Mais la cour a aussi estimé que les nouvelles règles ont été mises en place sans que l’on ne connaisse bien les enchaînements qui ont conduit à la catastrophe de Fukushima. Elle a aussi critiqué les plans d’urgence : un rayon de préparation à l’évacuation de 30 km mis en place après Fukushima pourrait être insuffisant (c’est 5 km en France…).

Rappelons que c’est la deuxième qu’un tribunal juge que les mesures de sûreté à Takahama ne sont pas suffisantes. Il s’agit donc d’une remise en cause de la politique énergétique du pays et du nouveau référentiel de sûreté mis en place après Fukushima. Ni le gouvernement, ni la NRA n’ont l’intention de changer leur politique.

Même si KEPCo gagne en appel, les procédures judiciaires vont prendre des mois, alors que la compagnie dépendait du nucléaire pour 50% de sa production électrique avant Fukushima. Cette décision va avoir un impact important sur ses finances alors qu’elle va perdre des clients après l’ouverture du marché le 1er avril prochain.

Il ne reste que deux réacteurs en activité au Japon sur 43 restant depuis la catastrophe nucléaire. Ce sont ceux de la centrale de Sendaï à Kagoshima.