Fin des indemnisations pour les personnes déplacées de la catastrophe nucléaire

A la fin mars 2018, TEPCo a dépensé plus de 8 000 milliards de yens (60 milliards d’euros) en indemnisations. Une moitié environ est allée aux personnes déplacées et l’autre aux entreprises et commerces affectées. Cet argent est avancé par l’Etat et selon une estimation récente de la cour des comptes japonaise, le coût des intérêts, à la charge des contribuables japonais pourrait atteindre 218,2 milliards de yens (1,7 milliards d’euros).

Les indemnisations sont officiellement terminées depuis le 31 mars 2018, mais ce n’est pas encore la fin pour TEPCo. Il y a une trentaine de plaintes collectives, regroupant plus de 12 000 personnes, pour réclamer de meilleures indemnisations.

Chaque personne qui a dû évacuer a reçu 100 000 yen par mois (760 €) en compensation du stress engendré auxquels pouvaient s’ajouter des indemnisations liées à la perte des ressources financières, au logement, aux transports… La seule partie liée au stress peut s’élever à 8,4 millions de yens (63 000 €) par personne sur 7 ans. Les 25 000 personnes originaires de la zone dite de retour difficile ont reçu une somme supplémentaire de 7 millions de yens (53 000 €) en une seule fois.

Ce soutien financier s’est terminé une année après la levée de l’ordre d’évacuer pour les personnes originaires des zones concernées et cette année pour toutes les autres. Cependant, le gouvernement a demandé à TEPCo de maintenir l’aide au logement une année de plus.

Ces indemnisations ont provoqué beaucoup de jalousies et des discriminations envers les personnes déplacées qui apparaissaient comme privilégiées. A titre de comparaison, les personnes auto-évacuées, qui sont parties d’elles-mêmes, sans y être obligées, ont reçu, en plus d’une aide au logement, 120 000 yens (900 €) en une seule fois. C’était 720 000 yens (5 400 €) pour les mineurs et les femmes enceintes. La différence de niveau de contamination de leur lieu de vie pouvait être très faible avec les personnes évacuées de force.

La fin des indemnisations ne signe pas la fin de la catastrophe, loin de là. Les populations affectées ne retrouveront jamais leur vie d’antan. Elles font toujours face à de nombreux problèmes. Il en est de même pour les communes affectées par les évacuations. Comme le taux de retour dans les zones où il est permis de rentrer est faible, de l’ordre de 15% en moyenne, certaines communes veulent attirer de nouveaux habitants. Tomioka, par exemple, offre à chaque famille 300 000 yens ( 2 300 €) par an pendant 3 ans, plus 180 000 yens (1 400 €) par an par enfant.

Accès autorisé pour une toute petite partie d’Ôkuma

La commune d’Ôkuma a entièrement été évacuée et est quasi-entièrement classée en zone de retour difficile. A partir du 24 avril prochain, les habitants de deux hameaux pourront passer la nuit chez eux. Il s’agit d’Ôgawara où l’exposition externe est comprise entre 20 et 50 mSv/an et de Nakayashiki, où elle est inférieure à 20 mSv/an. Seuls 379 personnes réparties dans 139 foyers y vivaient avant la catastrophe, soit à peine 3,6% de la population de la commune.

Le gouvernement espère y lever l’ordre d’évacuation au printemps 2019, quand le nouvel hôtel de ville sera prêt.

Selon un employé de TEPCo, un dirigeant de la compagnie a arrêté le projet de digue contre les tsunamis en 2008

Les auditions des témoins continuent dans le procès de trois anciens dirigeants de TEPCo. Un employé vient de rapporter que Sakaé Mutô, vice-président de la compagnie a arrêté le projet de digue anti-tsunami à la centrale de Fukushima daï-ichi.

Rappel de l’épisode précédent : un rapport interne à TEPCo daté de mars 2008 avait estimé qu’un tsunami pouvait atteindre une hauteur de 15,7 m à la centrale de Fukushima daï-ichi. Les calculs étaient basés sur une mise à jour, en 2002, des prédictions gouvernementales qui aboutissaient à un séisme de magnitude 8,2 au large de Fukushima.

Le témoin, dont les propos sont rapportés par l’Asahi et le Maïnichi, faisait partie de l’équipe en charge de définir les mesures de renforcement des protections contre les séismes et tsunamis, mise en place en novembre 2007. Il rapportait directement à Sakaé Mutô à l’époque. Selon lui, le groupe était arrivé au consensus que TEPCo devait prendre en compte la réévaluation gouvernementale du risque tsunami et a chargé une filiale de faire une estimation de la vague la plus haute. La filiale a informé le groupe en mars 2008 des résultats de son évaluation : 15,7 m. Et le groupe a informé Sakaé Mutô à ce sujet en juin de cette même année.

Toujours selon le témoin, M. Mutô aurait alors demandé que l’on prépare une demande de permis de construire une digue. Puis, en juillet 2008, M. Mutô aurait informé le groupe que TEPCo ne retenait pas cette valeur de 15,7 m, sans la moindre explication. Le groupe aurait été choqué par cette décision.

Comme on le sait, la vague la plus haute du tsunami de 2001 faisait 15,5 m de haut à la centrale de Fukushima daï-ichi… Le procès continue.

Le ministère de l’industrie intervient pour modifier la présentation d’un chercheur dans un lycée

Sadamu Yamagata, enseignant chercheur à l’université de Hokkaïdô, devait faire, le 16 octobre 2017, une présentation sur l’énergie pour les lycéens et la population de Niséko. Il avait prévu, notamment, de présenter les problèmes liés à l’énergie nucléaire. Il a envoyé sa présentation en avance, le 11 octobre dernier et dès le lendemain, deux représentants du ministère de l’industrie ont frappé à la porte de son bureau.

Selon l’Asahi, qui rapporte l’affaire, les représentants du ministère lui ont reproché de montrer une image de la centrale accidentée de Fukushima daï-ichi en affirmant qu’il s’agissait de manipulation destinée à donner une mauvaise image de l’énergie nucléaire. Pour eux, cette catastrophe nucléaire, ne doit être qu’une “rumeur néfaste”… Une autre planche leur a aussi déplu car elle osait demander : “Le nucléaire est-il bon marché ?”. Les représentants du ministère lui auraient suggéré de présenter une autre perspective.

L’enseignant-chercheur a fait sa présentation comme prévu, mais aurait ajouté une image d’une éolienne accidentée. Le Mainichi montre la planche avant et après :

Il s’agit là d’une atteinte inacceptable à la liberté académique.

Réouverture des écoles et des collèges dans 5 communes de Fukushima, avec très peu d’enfants

135 enfants ont fait leur rentrée pour la première fois en 7 ans dans 14 écoles et collèges de 5 communes de Fukushima. Il s’agit de Namié, Tomioka, Iitaté et le district Yamakiya de Kawamata, où l’ordre d’évacuer a été levé au printemps et 2017, sauf dans les zones dites de retour difficile, et de Katsurao, où l’ordre d’évacuer a été levé en juin 2016. C’est à peine 3% des 4 000 d’enfants scolarisés avant la catastrophe. Les écoles et collèges ont donc été regroupés, faute d’enfants, comme rapporté dans notre bilan annuel publié à l’occasion du septième anniversaire de cette catastrophe sans fin.

A Iitaté, une école toute neuve a été reconstruite et 75 élèves et collégiens sont inscrits. Il y a 5 mois, 90 étaient attendus. Ils étaient 742 avant la catastrophe. Les enfants vivent toujours en dehors de la commune, pour la plupart d’entre eux, et ont jusqu’à une heure de bus chaque jour pour venir à l’école ou au collège.

A Tomioka, seuls 17 enfants sont inscrits à l’école et au collège. Avant la catastrophe nucléaire, la commune avait deux écoles élémentaires et deux collèges, avec 1 487 enfants scolarisés. Le taux de retour dépasse à peine 1%. Le CP compte trois élèves.

A Katsurao, il y a 22 enfants en tout dans l’établissement qui regroupe la maternelle, l’école élémentaire et le collège.

Fin de la tentative d’arbitrage entre Namié et TEPCo

En 2013, la commune de Namié avait saisi la commission d’arbitrage mise en place par les autorités au nom de ses résidents forcés à évacuer. Plus de 15 000 personnes, soit environ 70% des habitants, avaient signé la pétition afin d’obtenir une meilleure indemnisation. TEPCo leur verse 100 000 yens (763 euros) par mois et, en mars 2014, la commission d’arbitrage avait tranché en faveur des habitants en proposant une augmentation de 50% environ. La commune avait accepté, mais pas TEPCo.

La commission n’a cessé, depuis, de demander à TEPCo d’accepter cet accord, en vain. Elle vient donc d’informer la commune qu’elle clôturait ce dossier. Les requérants pourraient saisir la justice à l’instar des 12 000 autres personnes qui ont déposé des plaintes collectives. La commune de Namié a fait savoir que 800 personnes concernées étaient déjà décédées.

TEPCo est venue présenter ses excuses après avoir été condamnée à dédommager un suicide

TEPCo a récemment été condamnée à indemniser la famille de Fumio Ôkubo, âgé de 102 ans, qui s’est suicidé le 12 avril 2011, après avoir appris qu’il devrait évacuer bientôt. Trois représentants de la compagnie ont rendu visite à la famille du défunt pour présenter leurs excuses. C’était une de ses revendications.

La belle fille du défunt a montré aux représentants de TEPCo le champ qu’il a cultivé toute sa vie : c’est devenu un site d’entreposage de déchets radioactifs issus de la décontamination.

Retrait de nombreux radiamètres à Fukushima

L’Autorité de Régulation Nucléaire veut retirer environ 80% des 3 000 radiamètres qui mesurent en continu le débit de dose un peu partout à Fukushima. Il y a plusieurs raisons derrière cette décision. D’abord, ils ont une durée d’utilisation limitée et ils doivent être bientôt remplacé. Leur entretien coûte 360 millions de yens (2,7 millions d’euros) par an. Et enfin, le débit de dose a diminué.

Ne devraient être enlevés, que les radiamètres en zone jamais évacuée où le débit de dose ambiant est passé sous la limite de 0,23 µSv/an, qui correspond à 1 mSv/an, selon les hypothèses faites pas les autorités japonaises. Selon l’Asahi, les 600 radiamètres qui resteront, auxquels il faut ajouter les balises de TEPCo et celles des communes, seront déterminés après discussions avec les riverains.

Reprise de l’instruction du dossier de sûreté de l’usine de retraitement de Rokkashô

L’usine dite d’extraction du plutonium des combustibles usés de Rokkashô-mura, dans la province d’Aomori, aurait être mise en service en 1997. Mais la date de démarrage a été repoussée 24 fois. Il y a déjà un retard cumulé de 24 ans.

Après l’accident nucléaire à la centrale de Fukushima daï-ichi et le renforcement des normes de sûreté, l’exploitant, Japan Nuclear Fuel, a dû revoir son dossier de sûreté qu’il a soumis à l’autorité de régulation nucléaire en 2014.

Puis, en août 2017, 800 litres d’eau de pluie a fui d’un tuyau situé dans une galerie souterraine et a atteint une pièce avec un générateur diesel de secours. La compagnie s’est alors aperçue que la galerie n’avait pas été inspectée pendant 14 ans, c’est à dire depuis sa construction. Les rapports de sûreté mentionnaient pourtant qu’il n’y avait rien à signaler.

En réaction, la NRA avait suspendu l’instruction du dossier de sûreté en octobre 2017. Elle vient de décider la reprise.

Cette usine dite de retraitement a une capacité de traitement de 800 tonnes de combustibles usés par an, de quoi extraire 8 tonnes de plutonium. Plus de 2 000 milliards de yens (15 milliards d’euros) ont déjà été dépensés depuis le début des travaux en 1993. Son démantèlement devrait coûter 1 500 milliards de yens (11,5 milliards d’euros). Tout cela pour aucun service rendu actuellement !