Agence de régulation nucléaire : remplacement d’un commissaire

Le gouvernement va remplacer deux des cinq membres de l’autorité de sûreté dont le mandat se termine en septembre.
Les sortants sont Kunihiko Shimazaki, un sismologue et Kenzo Ôshima, un ancien ambassadeur. Ils seront remplacés par Satoru Tanaka, ancien président de la société japonaise pour l’énergie nucléaire et Akira Ishiwatari, un géologue. Leur mandat dure 5 ans. Comme la NRA n’a que deux ans, le premier remplacement avait été tiré au sort si je me souviens bien.
Cette décision fait du bruit car Kunihiko Shimazaki avait été intraitable en ce qui concerne les failles sous les réacteurs. Personne, dans le village nucléaire, ne va le regretter. Il est remplacé par un promoteur du nucléaire, qui devrait être plus « compréhensible ». Satoru Tanaka a reçu de l’argent de l’industrie nucléaire par le passé. Il n’y a plus de sismologue parmi les 5 commissaires.
Alors que le gouvernement déclare qu’il veut redémarrer au plus vite les réacteurs, il se heurte à la nouvelle autorité de sûreté qui n’est pas aussi « flexible » que la précédente. En changeant les commissaires, il espère accélérer le processus. Mais les décisions prises risquent de manquer de crédibilité.
M. Shimazaki a remonté la barre en terme d’exigences à la tenue aux séismes, suite à ce qui s’est passé à Fukushima. Les exploitants ont essayé de résister, en vain. Il a, en particulier, conclu que les failles sous la centrale de Tsuruga étaient actives, ce qui la condamne. En revanche, après des examens complémentaires, il a reconnu que celles sous la centrale d’Ôï ne l’étaient pas.
Les exploitants du nucléaire et certains hauts fonctionnaires l’accusent d’avoir fait traîner l’instruction des dossiers de demande de redémarrage et de ne pas décider. Le Yomiuri, qui est la voix du village nucléaire, va jusqu’à dire que ses décisions étaient non-scientifiques. Mais ces critiques ne prennent pas en compte le fait que ses décisions étaient partagées avec d’autres géologues.

Deuxième rejet en mer et contamination des nappes

TEPCo a de nouveau rejeté de l’eau souterraine pompée en amont des réacteurs. C’est le deuxième rejet. Le premier faisait 561 m3, le deuxième, 641 m3.
La compagnie ne communique plus en anglais sur le sujet.

Records du jour de la contamination de l’eau souterraine :
–    dans le puits de contrôle G3, situé près de la cuve qui a débordé en février 2014, il y a maintenant 42 Bq/L en bêta total (prélèvement du 26 mai 2014).
–    dans le puits de pompage n°12 situé en amont des réacteurs, la concentration en tritium atteint 1 700 Bq/L (prélèvement du 26 mais 2014). Cette concentration dépasse la limite que TEPCo s’est fixée pour le rejet en mer qui est de 1 500 Bq/L. Mais la compagnie va diluer cette eau avec celle des puits voisins, moins contaminée, afin de satisfaire à ses critères de rejet. Les derniers résultats sur l’eau des cuves tampon sont ici : il y a 150 Bq/L pour le tritium.

TEPCo a publié en japonais (et en anglais) des résultats surprenants sur des prélèvements de septembre 2013 : dans le puits de contrôle 1-2, il y a 1 000 000 Bq/L en strontium, mais seulement 500 000 Bq/L en bêta total, ce qui est impossible. Dans le puits 1-16, il y a 580 000 Bq/L en strontium contre 400 000 Bq/L en bêta total. Comme le strontium est un émetteur bêta, il y a incompatibilité entre ces mesures. Dans ce dernier puits, en octobre, c’était 890 000 Bq/L en strontium et 880 000 Bq/L en bêta total.
Ce problème n’est pas nouveau : le détecteur bêta total saturait quand la contamination est trop forte et sous-estimait les résultats. TEPCo avait prétendu avoir résolu le problème. Cela ne semble pas être le cas.
De plus, dans le puits 1-9, il y a 300 Bq/L en strontium et 80 Bq/L en bêta total. Ce ne sont pas des contaminations qui saturent les détecteurs !
Plusieurs records de contamination en strontium sont aussi battus. La plus forte valeur est de 1,4 million de becquerels par litre en strontium dans le puits 1-16 en décembre 2014. C’est énorme.

Préparation à l’évacuation autour de Shimané

Il y a 400 000 habitants dans un rayon de 30 km autour de la centrale de Shimané. En cas d’accident, il faudrait en évacuer 270 000 en dehors de cette province. Un accord vient d’être signé avec les provinces voisines de Hiroshima et Okayama.
C’est Shimané qui devra contrôler la contamination des évacués et payer la note. Les provinces vont maintenant discuter avec les communes.

Témoignage de M. Yoshida et réacteur n°3

L’Asahi continue d’éplucher le témoignage de Masao Yoshida, l’ancien directeur de Fukushima daï-ichi. Cette fois-ci, le quotidien s’interroge sur l’interruption de l’injection d’eau dans le réacteur n°3 le 13 mars 2011.
Si vous avez bonne mémoire, l’injection d’eau de mer dans le réacteur n°1 avait déjà fait polémique. Faute d’eau douce, de l’eau de mer avait été utilisée. La question avait été traitée au cabinet du premier ministre et le siège de TEPCo avait demandé à M. Yoshida de suspendre l’injection d’eau de mer. Il avait passé outre l’ordre.
Le même problème a eu lieu pour le réacteur n°3, le 13 mars. A 5h42, après avoir été alerté que les cuves d’eau douce étaient vides, M. Yoshida ordonne d’utiliser de l’eau de mer. Mais à 6h43, il aurait reçu un coup de fil depuis la ligne de TEPCo installée dans la cellule de crise du premier ministre. Il ne sait plus qui l’a appelé. L’ordre lui est donné d’éviter au possible l’eau salée, qui est corrosive. On peut imaginer que TEPCo espérait encore sauver des réacteurs. Il a répondu qu’il ferait de son mieux pour trouver de l’eau douce.
Vers 9h13, un des vice-présidents de TEPCo suggère, dans une visio-conférence, d’utiliser de l’eau de mer.
A 12h18, M. Yoshida donne l’ordre d’utiliser l’eau de mer car les nouvelles sources d’eau douce sont taries. Il pensait que cela prendrait 10 minutes. Cela a pris une heure pendant laquelle il n’y a pas eu d’injection d’eau. L’eau de mer est arrivée à 13h11.

Indemnisation des évacués

Les habitants de Namié avaient saisi la structure de conciliation à propos de leur indemnisation. Ils réclamaient plus d’argent. L’arbitre a accepté de proposer une augmentation mensuelle de 150 000 yens (1 100 euros), qui est rétroactive sur deux ans. Selon les autorités municipales, 98% des habitants accepteraient cet arbitrage. TEPCo n’a pas encore donné son accord et dit l’étudier. Elle doit répondre avant le 28 mai.
15 000 habitants ont dû être évacués de Namié.

La justice vient de décider qu’un homme originaire de la zone comprise entre 20 et 30 km, considéré comme évacué « volontaire », a droit à une indemnisation de la part de TEPCo. Il réclamait 130 millions de yens (0,9 million d’euros) car il souffrait de stress post-traumatique qui l’empêchait de travailler. La cour de Kyôto, où il habite actuellement, a reconnu que son stress était lié à l’accident nucléaire. Elle a demandé à TEPCo de payer 400 000 yens (2 900 euros) par mois pendant un an à partir de mai. Cette somme est basée sur son revenu avant l’accident et d’autres facteurs.
TEPCo a refusé de commenter ce jugement.