Selon le Fukushima Minpo, un parc mémorial va être créé en bord de mer, sur les communes de Namié et Futaba. D’une surface de 50 ha, il sera dédié à la mémoire des victimes de la triple catastrophe (séisme, tsunami et accident nucléaire). Un musée de forme cylindrique sera aussi construit au sommet d’une élévation. L’inauguration pourrait avoir lieu cet automne.
Archives mensuelles : juillet 2020
Tribune d’un rapporteur spécial de l’ONU : la gestion des déchets radioactifs est aussi une décision relative aux droits humains
L’agence de presse Kyodo a publié une tribune, reprise par le Maïnichi, de Baskut Tuncak, rapporteur spécial de l’ONU depuis 2014 sur les implications pour les droits humains de la gestion et de l’élimination écologiquement correcte des substances et déchets dangereux. La voici en français :
Dans quelques semaines, le gouvernement japonais aura l’occasion de montrer au monde entier à quel point il attache de l’importance à la protection des droits humains et de l’environnement et au respect de ses obligations internationales.
Au lendemain de la catastrophe nucléaire de Fukushima daï-ichi, moi-même et d’autres rapporteurs spéciaux de l’ONU avons constamment exprimé nos préoccupations quant aux approches adoptées par le gouvernement japonais. Nous avons craint que le relèvement des “limites acceptables” d’exposition aux radiations pour inciter à la réinstallation ne viole les obligations du gouvernement en matière de droits humains envers les enfants.
Nous nous sommes inquiétés de l’exploitation possible des migrants et des pauvres pour les travaux de décontamination radioactive. Notre préoccupation la plus récente est la façon dont le gouvernement a utilisé la crise COVID-19 pour accélérer considérablement son calendrier de décision concernant le déversement dans l’océan des eaux radioactives qui s’accumulent à Fukushima daï-ichi.
En mettant de côté les devoirs de consultation et de protection qui incombent au Japon en vertu du droit international, je suis attristé de penser qu’un pays qui a subi les horreurs d’être le seul sur lequel non pas une mais deux bombes nucléaires ont été larguées pendant la guerre, continuerait sur cette voie pour faire face aux conséquences radioactives de la catastrophe de Fukushima daï-ichi.
Le rejet des eaux usées toxiques collectées à la centrale nucléaire de Fukushima serait, sans aucun doute, un coup terrible porté aux moyens de subsistance des pêcheurs locaux. Indépendamment des risques sanitaires et environnementaux, l’atteinte à la réputation serait irréparable, une cicatrice invisible et permanente sur les produits de mer locaux. Aucune somme d’argent ne peut remplacer la perte de culture et de dignité qui accompagne ce mode de vie traditionnel pour ces communautés.
Les communautés de Fukushima, si dévastées par les événements tragiques du 11 mars 2011, ont exprimé ces dernières semaines leurs préoccupations et leur opposition au rejet de l’eau contaminée dans leur environnement. C’est leur droit à un environnement qui leur permette de vivre dans la dignité, de profiter de leur culture et de ne pas être délibérément exposées à une contamination radioactive supplémentaire. Ces droits doivent être pleinement respectés et ne doivent pas être ignorés par le gouvernement de Tôkyô.
Le déversement de déchets nucléaires dans l’océan pourrait nuire aux relations internationales du Japon. Les pays voisins sont déjà préoccupés par le rejet d’importants volumes de tritium radioactif et d’autres contaminants dans les eaux usées.
Le Japon a le devoir, en vertu du droit international, de prévenir les dommages environnementaux transfrontaliers. Plus précisément, en vertu de la Convention de Londres, le Japon a l’obligation de prendre des précautions en ce qui concerne le déversement de déchets dans l’océan. Compte tenu de l’incertitude scientifique quant aux effets sur la santé et l’environnement de l’exposition à des rayonnements de faible intensité, le rejet de ces eaux usées serait totalement incompatible avec l’esprit, sinon la lettre, de cette loi.
Les peuples autochtones ont un droit internationalement reconnu au consentement libre, préalable et éclairé. Cela inclut l’élimination des déchets dans leurs eaux et les actions susceptibles de contaminer leur alimentation. Quelle que soit l’importance de la contamination de leur eau et de leur nourriture, le gouvernement japonais a l’obligation incontestable de consulter les peuples indigènes potentiellement affectés, obligation qu’il n’a pas remplie.
Le gouvernement japonais n’a pas, et ne peut pas, s’assurer de consultations significatives comme l’exige le droit international des droits de l’homme pendant la pandémie actuelle. Rien ne justifie un calendrier aussi dramatiquement accéléré pour la prise de décision pendant la crise de la covid-19. Le Japon dispose de l’espace physique nécessaire pour stocker les eaux usées pendant de nombreuses années.
Depuis six ans, je présente un rapport annuel au Conseil des droits de l’homme des Nations unies. Qu’il s’agisse des droits de l’enfant ou des droits des travailleurs, dans presque toutes les discussions aux Nations unies, la situation de Fukushima daï-ichi est soulevée par des observateurs inquiets, afin que le monde entier puisse l’entendre. Les organisations intervenantes ont demandé année après année au gouvernement japonais de leur adresser une invitation à se rendre sur place afin que je puisse faire des recommandations pour améliorer la situation. Je regrette que mon mandat arrive à son terme sans cette possibilité, malgré mes demandes répétées de visite et d’évaluation de la situation.
La catastrophe de 2011 ne peut être annulée. Toutefois, le Japon a encore la possibilité de minimiser les dégâts. À mon avis, il existe de graves risques pour les moyens de subsistance des pêcheurs au Japon et pour sa réputation internationale. Une fois de plus, j’invite le gouvernement japonais à réfléchir à deux fois à son héritage : en tant que véritable champion des droits de l’homme et de l’environnement, ou pas.
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Le Japon devrait fermer une centaine de vieilles centrales à charbon d’ici 2030
Le gouvernement japonais veut fermer une centaine de vieilles centrales à charbon d’ici 2030. Il y a actuellement 140 centrales à charbon fournissant de l’électricité, dont 114 anciennes et peu efficientes. La plupart ont été mises en service avant les années 1990. Le gouvernement veut ainsi réduire ses émissions de gaz à effet de serre.
A la place, le gouvernement veut promouvoir les énergies renouvelables et le nucléaire… La réduction de la consommation n’est pas évoquée dans les médias. Pour le nucléaire, c’est plus facile à dire qu’à faire. Il n’y a eu que 9 remises en service depuis l’accident nucléaire à la centrale de Fukushima daï-ichi, sur 54 réacteurs avant la catastrophe. Et il n’y a eu aucune remise en service en 2019 et en 2020.
Le nucléaire fournit 3% de l’électricité japonaise et le gouvernement veut atteindre 20 à 22% d’ici 2030 ! C’est peu réaliste. Pour les renouvelables, elles fournissent actuellement 16 à 17% de l’électricité et le gouvernement veut arriver à 22 – 24% en 2030. Le Japon va continuer à utiliser du charbon et construire de nouvelles centrales ayant un meilleur rendement. Et il continue à en construire dans d’autres pays. Le charbon devrait encore fournir 26% de l’électricité en 2030 contre 32% en 2018. La baisse est donc faible.
Evidemment, produire de l’électricité avec de vieilles centrales coûte moins cher. Le gouvernement va mettre en place un groupe de travail pour trouver le meilleur moyen d’inciter les compagnies à renoncer à ces centrales polluantes. Il pourrait mettre des quotas. A noter que les émissions de CO2 des nouvelles centrales sont seulement de 30% inférieures.
De nombreuses ONG demandent l’arrêt de l’utilisation du charbon comme source d’énergie, aussi bien au niveau domestique qu’à l’export, car il est très polluant. Dans un éditorial, l’Asahi et le Maïnichi vont dans le même sens. L’Asahi souligne, notamment, que le Japon est le seul pays du G7 à construire des centrales à charbon dans des pays moins développés et à soutenir financièrement ces projets. Le Ministère de l’environnement pousserait à sortir du charbon car les énergies renouvelables deviennent plus compétitives et le Ministère de l’économie pousserait à continuer à exporter des centrales à charbon. Les banques japonaises financent aussi la construction de ces centrales. Le lobby du charbon reste très puissant au Japon.