Minami-Sôma est située le long du littoral, au Nord de la centrale de Fukushima daï-ichi.
Une partie de la commune, située à moins de 20 km a été évacuée en urgence en mars 2011. Dans l’autre partie, située entre 20 et 30 km, la population a été mise à l’abri pendant une dizaine de jours. Les personnes qui pouvaient partir sont parties et celles qui n’avaient pas le choix ont été abandonnées. Le maire avait lancé un appel à l’aide émouvant le 24 mars 2011.
S’en était suivie une “recommandation” à évacuer la zone comprise entre 20 et 30 km, puis une levée de cette recommandation en 2011.
Pour la partie située à moins de 20 km, l’ordre d’évacuer a été levé presque partout en juillet 2016. Mais, au 1er août, à peine 400 personnes de ces zones sur plus de 10 000 seraient rentrées définitivement. Il reste encore des zones dites de “retour difficile” pour lesquelles il n’y a pas de retour prévu pour le moment.
Premières impressions
Dans la partie de la commune située au delà de 20 km, qui n’a pas été évacuée durablement, la situation est loin d’être “normale”. Le premier choc quand on arrive dans la commune est de voir toutes les rizières et les champs en jachère.
Il y a bien quelques rizières en culture, mais c’est très rare.
Puis, il n’y a presque personne dans les rues. On voit très peu d’enfants. En début et fin de journée, dans les “conbini”, ces superettes ouvertes 24h/24, il y a essentiellement des décontamineurs. Les bus de travailleurs s’y arrêtent les uns après les autres.
C’est pareil dans les restaurants, hôtels… il n’y a quasiment que des hommes qui sont là pour travailler à la centrale ou à la décontamination. Il existe aussi un “Mobile-Inn” pour l’hébergement, fait de préfabriqués qui est visible sur Google-maps :
Comme partout, dans les territoires contaminés, on voit des déchets en attente de traitement
et des bornes de mesure de la radioactivité, supposées rassurer.
Voici l’intérieur :
Témoignages
L’ACRO était à Minami-Sôma avec Chikurin, notre laboratoire partenaire de Tôkyô, pour tester une caméra gamma utilisée pour repérer les points chauds résiduels après la décontamination. A voir ici en japonais, sur le site de Chikurin.
Chez A, un couple âgé dont la maison est située en lisière de la forêt, la décontamination s’arrête à quelques mètres :
La caméra gamma a surtout repéré la contamination de la forêt environnante.
Devant la maison, habitée, un panneau, alerte les éventuels badauds :
Les habitants de la maison contrôlée sont partis deux ans. Cela fait quarante ans que le mari élève et observe, pour son plaisir, les têtards d’une espèce de grenouilles qui pondent leurs œufs dans les arbres (Rhacophorus arboreus).
A leur retour, après deux années d’évacuation, il a observer une baisse significative du nombre d’œufs et de têtards, ainsi que des malformations.
Chez B., un couple âgé, la caméra gamma a repéré une table de jardin en bois. Dans le beau potager, les légumes se sont faits rares car les enfants ne veulent plus en manger. La rizière n’est plus cultivée. Dans le bosquet qui entoure le jardin pour le protéger du vent, les sapins ont des malformations similaires à celles étudiées dans cette publication scientifique.
Ce sont généralement les branches les plus proches du sols qui ne sont pas ramifiées.
La contamination des poussières est aussi un sujet de préoccupation. Un linge a été étendu afin de pouvoir faire des contrôles. La méthode, à la portée de tous, a été mise au point par Chikurin.
Pas étonnant que le taux de retour soit faible. Comme l’ACRO le signalait dans son rapport rédigé à l’occasion du cinquième anniversaire de la catastrophe nucléaire, la population de Minami-Sôma a diminué de 66% par rapport à avant l’accident et l’âge moyen des habitants a augmenté de 14 années, un niveau attendu en 2025. Le nombre de personnes âgées qui ont besoin de soins spécialisés a augmenté d’approximativement 29% entre février 2011 et mai 2013 alors que la moitié des hôpitaux et des cliniques ont dû fermer et que le nombre de médecins et d’infirmières a baissé de 15% et 19% respectivement. Plus généralement, la population en âge de travailler a baissé de 33% à Minami-Sôma alors que la reconstruction demande beaucoup de main d’œuvre.