En juin 2016, jusqu’à 15 500 personnes étaient engagées chaque jour dans des travaux de décontamination. Cela génère des déchets radioactifs, d’énormes quantités de déchets, qu’il faut gérer. La politique japonaise consiste en l’incinération pour réduire les volumes, puis en l’entreposage, voir le stockage définitif, en fonction des lieux et du niveau de contamination.
Petit voyage sur les lieux, de la production à l’incinération.
La décontamination consiste à racler les sols contaminés, émonder les arbres et arbustes, couper les herbes, ramasser les végétaux morts… et mettre le tout dans des sacs qui s’amoncèlent partout.
Et après ?
Ils restent entassés partout. A Iitaté-mura, où la décontamination bat son plein, il y en a partout. Le village, où l’ordre d’évacuer n’a pas été levé, est devenu un vaste chantier avec quasiment que des décontamineurs partout et des déchets.
Les bâches qui couvrent les déchets sont pour protéger les sacs qui n’ont pas la vie longue. Ainsi, à Tomioka, où ils attendent depuis plus longtemps, de l’herbe repousse :
Les déchets des zones non évacuées sont pris en charge par la province de Fukushima. Le stockage est alors entouré d’une palissade, comme ici, à Minami-Sôma :
Et après ?
C’est l’incinération qui est prévue. Le réseau des citoyens inquiets de l’incinération des déchets radioactifs a recensé une vingtaine de sites avec des incinérateurs en fonctionnement, en construction ou en projet à Fukushima. Voici la carte :
La carte originale en japonais a été traduite en anglais dans la publication n°6 de FUKUDEN et reprise ci-dessus.
A Iitaté-mura, village dans les montagnes, il y a deux incinérateurs éloignés de tout. Le premier, appelé “Iitaté clear center” était déjà en service avant l’accident nucléaire. Ils incinérait les ordures ménagères. Il a été remis en service pour incinérer les déchets radioactifs.
Il peut incinérer 5 tonnes de déchets par jour.
A titre de comparaison, 1 mSv/an, en supposant que l’on reste 8h par jour à l’extérieur et avec un facteur de réduction à l’intérieur, correspond à 0,23 microsievert par heure. Ici, c’est 0,929 µSv/h.
Ce centre est entouré de déchets à perte de vue. On peut en voir une partie sur les images satellite de Google ou de Bing. Une forêt a été rasée pour les entasser et les troncs sont restés là :
On voit que la cheminée de l’incinérateur fume. Au bout de la vidéo, les déchets continuent à s’entasser à perte de vue sous la ligne haute tension :
Un deuxième incinérateur a été construit à Warabidaïra, dans la commune d’Iitaté-mura pour faire face aux volumes énormes de déchets. Il n’est pas encore sur les images satellite de Google.
Autour du site, le débit de dose ambiant peu atteindre 2,6 µSv/h :
A Tomioka
La commune, encore entièrement évacuée, accueille la centrale nucléaire de Fukushima daï-ni. La décontamination est officiellement terminée dans la plupart de ses zones résidentielles. Ses finances dépendaient fortement du nucléaire. Le “community center”, avec la bibliothèque, des salles d’activité et de réunion a été payé par TEPCo.
Cette commune fait face à la mer et le littoral a été détruit par le tsunami. La gare, au bord de l’eau, n’existe plus. Les autorités prévoient d’y construire une digue de protection et d’y planter une forêt pour se protéger :
Mais en attendant, le littoral accueille les déchets et des usines de traitement. Espérons qu’un tsunami ne viennent pas emporter tout cela. Commençons par une vue satellite copiée sur Google :
En utilisant “street view”, on peut voir les déchets. La date de la prise de vue en voiture ne correspond pas à celle des satellites.
Ainsi, à Tomioka, outre des déchets, il y a un incinérateur de déchets radioactifs construit par Mitsubishi, derrière lequel on aperçoit la centrale de Fukushima daï-ni :
Pour l’anecdote, une étude des lieux avec une caméra gamma pour trouver les points chauds a montré que c’était la cheminée de la centrale qui brillait le plus. Pas très loin, il y a un centre de tri des déchets, situé entre la gare de Tomioka dévastée par le tsunami et l’océan :
Le tout est entouré d’amoncellements de déchets en attente de traitement. De l’autre côté de Fukushima daï-ni, sur la commune de Naraha, où l’ordre d’évacuation a été entièrement levé, c’est une autre usine qui est en construction. Elle devrait permettre de couler les cendres d’incinération dans du ciment :
Le début des opérations est prévu en 2017. Avec, là encore, des déchets dans le prolongement de la vallée, vers l’océan :
Voir aussi une vidéo montrant cette usine en construction et les déchets qui s’entassent dans la vallée qui va vers l’océan :
Et après ?
Cela dépend de la nature des déchets et de la concentration en césium radioactif. Tomioka va continuer à accueillir définitivement une partie des déchets, dans le “Fukushima Ecotech Clean Center“. Avec un nom comme cela, il y a de quoi s’inquiéter… SItué à la frontière avec la commune de Naraha, ce centre de stockage de déchets industriels devrait recevoir des déchets radioactifs dont la contamination est inférieure à 100 000 Bq/kg. Il s’agit d’un stockage définitif. Sa capacité est trop faible pour les 22 millions de mètres cubes officiellement attendus.
Le gouvernement veut entreposer ces déchets sur 16 km2 tout autour de la centrale de Fukushima daï-ichi, pour une durée de 30 ans. Il s’agit essentiellement de sols contaminés. Mais, selon le dernier bilan officiel en anglais du ministère de l’environnement du Japon, les autorités n’ont pu signer de contrat avec les propriétaires terriens que pour 45 ha sur 1 600 nécessaires, soit 2,8% de la surface totale… Voici la carte du projet :
La carte originale en japonais du ministère de l’environnement a été traduite par Fukuden et reprise ci-dessus.
Il y aura aussi les déchets de démolition des maisons abandonnées dans les territoires contaminés. Le gouvernement espère avoir terminé leur destruction avant mars 2018. Il y en a 8 800 en tout à la date de juin 2016, dont 5 600 encore à démolir, selon le Fukushima Minpo.
Et encore après ?
Le gouvernement n’a pas encore trop d’idée sur ce qu’il va faire de ces déchets après 30 ans. La seule proposition concrète a été d’en recycler une partie dans des ouvrages de construction, comme des routes, digues… Il va rapidement perdre la mémoire de ces déchets disséminés partout qui seront radioactifs encore longtemps. Le gouvernement a adopté cette politique le 1er juillet 2016, malgré les réserves des experts consultés.
Dans la province de Chiba, des déchets radioactifs ont déjà été déclassifiés et ne sont plus considérés comme radioactifs, bien que leur contamination soit encore de 4 000 Bq/kg à 6 100 Bq/kg en moyenne.
Il y aura aussi tous les incinérateurs et autres usines de traitement des déchets à démanteler, car la province de Fukushima n’en a pas besoin d’autant… Que deviendront-ils ?
Si vous voulez voir d’autres déchets, avec des photos professionnelles, c’est par ici. Cliquer à droite ou à gauche du texte pour voir les photos.