Nouveau plan énergie du Japon : rien de changé !

En août dernier, le gouvernement a lancé les discussions pour réviser le plan énergie de 2015 et le ministère de l’économie a finalement décidé de ne rien changer, malgré des objectifs irréalistes : le projet de plan rendu public le 16 mai dernier vise toujours 20 à 22% d’électricité nucléaire à l’horizon 2030 et 22 à 24% d’électricité renouvelable. Ce ne sera pas possible pour le nucléaire car cela obligerait à exploiter une trentaine de tranches. Seulement 8 réacteurs ont été remis en service depuis la catastrophe nucléaire à la centrale de Fukushima daï-ichi et 15 arrêtés définitivement. Pour cela, il faudrait donc construire de nouvelles centrales, même si ce n’est pas évoqué dans le plan, car c’est impossible dans le contexte actuel. Les autorités auraient dû renforcer la part des renouvelables, actuellement à 15%, pour compenser et éviter de recourir plus au charbon, extrêmement polluant.

Le tableau ci-dessous, reproduit de Reuters, donne la part de chacune des grandes familles d’énergie dans la production d’électricité. Les chiffres pour 2030 sont ceux du plan.

2010 2016 2030
Renouvelables 10% 15% 22-24%
Nucléaire 25% 2% 20-22%
Fossiles 65% 83% 56%

Le plan considère le nucléaire et le charbon comme des énergies importantes en base. Les ambitions du Japon en terme de lutte contre le réchauffement climatiques restent donc timides. Lors du sommet de Paris sur le climat, il avait fini par ratifier l’accord après avoir traîné des pieds. Il y a environ 150 centrales à charbon au Japon, qui fournissent environ 32% de l’électricité.

Cela montre que le gouvernement n’a aucune vision pour l’avenir énergétique du Japon et qu’il s’accroche à des compromis politiciens, complètement irréalistes. Il ignore les initiatives locales en faveur d’une transition énergétique : de nombreuses communes japonaises ont créé ou envisagent de créer des régies municipales pour vendre une électricité moins chère que celles des majors du secteur. C’est regrettable pour le pays.

Le plan maintient aussi le retraitement des combustibles nucléaires usés, même si la mise en service de l’usine de retraitement de Rokkashô-mura accuse déjà 24 ans de retard et qu’il n’y a pas de débouchés pour le plutonium extrait.

Les grandes compagnies japonaises qui possèdent le réseau électrique, rechignent à transporter l’électricité de leurs concurrents. Cela ralentit le développement des énergies renouvelables, comme le dénonce le Japan Times, et plusieurs compagnies qui s’étaient lancées sur ce nouveau marché ont fait faillite, faute de débouchés. SI le gouvernement n’impose pas un meilleur accès au réseau aux énergies renouvelables, il ne pourra pas atteindre l’objectif peu ambitieux qu’il s’est fixé pour 2030.

Selon l’Asahi, le ministre des affaires étrangères du Japon a critiqué ce plan et a demandé d’augmenter la part des renouvelables à 40% à l’horizon 2030 pour que le Japon puisse tenir ses engagements internationaux en termes de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Le ministre de l’environnement, quant à lui, aurait aussi plaidé pour plus de renouvelables, avec un objectif à 35% pour 2030.

Le ministère de l’économie du Japon a mis en ligne une brochure en anglais de présentation de la situation énergétique du pays. Des statistiques plus complètes sont ici en japonais. En ce qui concerne l’électricité et le nucléaire en particulier, il apparaît que le coût de l’électricité a augmenté de 25% pour les ménages et de 38% pour industries, depuis la catastrophe nucléaire, et qu’il a entamé une redescente à partir de 2014, suite à la baisse du cours du pétrole. Les émissions de CO2 ont aussi augmenté et atteint un pic historique en 2013. Elles sont à la baisse depuis, sans que le ministère n’indique pourquoi.