Suspension de l’instruction du dossier de sûreté de Tsuruga à cause de falsification de données

L’Autorité de régulation nucléaire a décidé de suspendre à nouveau l’instruction du dossier de sûreté du réacteur n°2 de la centrale de Tsuruga, suite à la falsification données géologiques relatives à la faille qui passe sous la centrale par l’exploitant, Japan Atomic Power Co..

Rappelons qu’après de longues investigations, l’Autorité de régulation nucléaire avait conclu, en novembre 2014, que la faille sismique qui passe sous le réacteur n°2 est encore active, ce qui conduit à l’interdiction d’exploitation. L’exploitant a toujours contesté ces conclusions et a déposé une demande d’autorisation de remise en service, un an plus tard. Mais, comme nous l’avons déjà rapporté en février 2020, l’Autorité de régulation soupçonne l’exploitant d’avoir falsifié les documents soumis. Dans les zones les plus critiques, les données avaient été effacées et remplacées par d’autres, qui faisaient apparaître la faille comme moins active. Certaines phrases auraient aussi été modifiées afin de ne jamais laisser apparaître que la faille puisse être active.

L’exploitant avait alors reconnu avoir effectué 80 modifications, suite à de nouvelles investigations. Certains changements ont été apportés afin d’exclure la possibilité que la faille se soit déplacée dans le passé. L’exploitant avait expliqué qu’il n’y avait rien d’intentionnel, car il ne savait pas qu’il ne devait pas modifier les données… Le président de l’Autorité de régulation nucléaire avait jugé ces explications “grotesques”. Cela avait conduit à une première suspension de l’instruction, qui avait repris en octobre 2020, après que l’exploitant ait transmis toutes les données brutes collectées par le sous-traitant qui a conduit les investigations géologiques.

Des inspections ont alors été menées au siège de la Japan Atomic Power Co., ce qui a permis de découvrir que la gestion des tâches de l’entreprise était inappropriée. L’Autorité de régulation nucléaire vient donc de décider de suspendre à nouveau l’instruction du dossier de sûreté jusqu’à ce qu’elle confirme que l’exploitant a amélioré la gestion des données, car la fiabilité de la documentation est indispensable.

Japan Atomic Power Co. a quatre réacteurs nucléaires, dont deux arrêtés définitivement. Elle n’a pas remis en service les deux autres depuis 10 ans. Comme sa seule activité est de fournir de l’électricité nucléaire à d’autres compagnies d’électricité, dont TEPCo, elle n’a plus de revenu et aurait fait faillite sans leur soutien financier. L’autre centrale est à Tôkaï-mura où la justice a suspendu la remise en service du réacteur n°2.

Mise à jour du 26 août 2021 : Dans un éditorial, l’Asahi estime que Japan Atomic Power Co. est disqualifiée pour exploiter du nucléaire, qui est sa seule activité, car la falsification des données est extrêmement grave. L’Autorité de régulation ne peut pas vérifier la véracité des données et des milliers de pages qui lui sont soumises et elle part de l’hypothèse de la bonne foi de l’exploitant. Avec cette affaire, c’est tout le dossier de sûreté qui devient suspect.

Si Japan Atomic Power Co. ne peut pas remettre en service les deux réacteurs nucléaire qu’il lui reste, c’est sa raison d’être qui est en jeu. Mais, après 10 années de tergiversations, il serait peut-être temps de se rendre à l’évidence que cette compagnie est condamnée.