Le Japon, champion du démantèlement ?

Le Japon espère profiter de la catastrophe de Fukushima pour devenir le leader mondial du démantèlement nucléaire, un marché énorme au niveau mondial. La stratégie gouvernementale et des entreprises impliquées sur le site de la centrale accidentée est orientée dans ce sens. C’est aussi l’objet de la création récente de l’International Research Institute for Nuclear Decommissioning. Beaucoup d’argent public est mis dans le développement de nouvelles technologies, dont de la robotique,
TEPCo va aussi se scinder en deux entités, une pour la production et le transport de l’électricité, son activité traditionnelle, et l’autre sur le démantèlement et la décontamination.
Il y a effectivement un effort technologique sans précédent à faire pour venir à bout de la centrale de Fukushima daï-ichi, avec son corium que personne ne sait comment aller récupérer, pour traiter l’eau qui s’accumule… Mais, il faut aussi penser à la sûreté du chantier, aux facteurs humains et sociaux… Ils sont 3 000 chaque jour sur le site de la centrale de Fukushima daï-ichi. Les robots ont besoin d’hommes pour les piloter, les contrôler, voire aller les rechercher s’ils tombent en panne. Sur ces aspects là, il y a aussi d’immenses progrès à faire ! Les scandales à répétition sur le chantier qu’est devenu la centrale accidentée montre que TEPCo est loin d’avoir fait ses preuves.
Et puis, il y aura toujours les volumes énormes de déchets radioactifs sans solution pour le moment.
Le démantèlement est peut-être une belle opportunité économique, mais les exploitants du nucléaire vont toujours ergoter sur les coûts. TEPCo, en faillite si elle n’avait pas été nationalisée, choisit toujours l’option la moins chère. Cela concerne les matériaux retenus, mais aussi les outils. Pourquoi dépenser pour un outil qui sera contaminé et qui finira en déchet radioactif ? L’autre marge de manœuvre financière est la masse salariale.
L’enjeu principal pour ces compagnies va donc être de mettre en avant leur maîtrise du démantèlement tout en cachant les problèmes qui ne vont pas manquer d’apparaître du fait des options bon marché choisies. La transparence va s’en trouver affectée.
La communication en anglais de TEPCO a déjà été reprise en main. Presque plus aucune info sur les incidents, mais de belles déclarations sur les succès remportés. Les médias, forcément embarqués comme sur une zone de conflit, ne pourront voir que ce que la compagnie voudra bien leur montrer.
Business as usual… Il est donc indispensable d’avoir une autorité de sûreté puissante et stricte comme contre-pouvoir. Pour le moment, la NRA consacre plus de ressources humaines à l’instruction des dossiers de demande de redémarrage qu’à la surveillance du chantier de Fukushima daï-ichi.
En dehors de la centrale, les expériences de décontamination ne sont pas probantes, comme nous l’avons déjà rapporté de multiples fois sur ce blog. L’AIEA et autres experts internationaux ont droit à des chantiers Potemkine. Mais la presse, des ONG peuvent enquêter et des scandales éclatent de temps en temps : rejet des déchets dans les rivières ou la forêt, sous-traitance en cascade, exploitation des travailleurs…