La Cour suprême du Japon a estimé que l’Etat n’était pas responsable de l’accident survenu en 2011 à la centrale nucléaire de Fukushima daï-ichi. L’arrêt porte sur quatre actions en dommages et intérêts intentées par des personnes déplacées. Les défendeurs étaient l’État et TEPCo, l’exploitant de la centrale. Cet arrêt est le premier rendu par la plus haute juridiction sur la responsabilité du gouvernement dans l’accident nucléaire et pourrait faire jurisprudence lors de procès similaires intentés dans tout le pays. Quant à la responsabilité de TEPCO, la Cour suprême avait déjà rendu des arrêts condamnant l’exploitant à verser des indemnités aux plaignants.
Le litige portait sur la question de savoir si l’État aurait pu prévoir le risque d’un tsunami massif sur la base d’une évaluation à long terme des activités sismiques possibles publiée par une organisation gouvernementale neuf ans avant l’accident, et si l’accident aurait pu être évité si le gouvernement avait ordonné à TEPCo de prendre des mesures de prévention. L’évaluation prévoyait une probabilité de 20 % qu’un tremblement de terre de magnitude 8 déclenchant un tsunami se produise le long de la fosse du Japon dans l’océan Pacifique au cours des 30 prochaines années, y compris dans la zone située au large de Fukushima. Puis, sur la base de cette évaluation, une filiale de la compagnie d’électricité avait estimé en 2008 qu’un tsunami d’une hauteur maximale de 15,7 mètres pourrait frapper la centrale nucléaire. Les plaignants ont fait valoir que la catastrophe aurait pu être évitée si le gouvernement avait exercé ses pouvoirs réglementaires pour ordonner à TEPCo de prendre des mesures préventives.
Le juge en chef, Monsieur Hiroyuki Kanno, a déclaré que le tremblement de terre qui s’est produit le 11 mars 2011 était beaucoup plus puissant que ce à quoi le gouvernement aurait pu s’attendre et que le tsunami qui s’en est suivi était également plus important que prévu. Il a ajouté que l’inondation de la centrale nucléaire n’aurait pas pu être évitée, même si le gouvernement avait ordonné à TEPCO de prendre les mesures nécessaires. A noter que l’un des quatre juges qui ont délibéré s’est opposé à la décision. Selon lui, “si le gouvernement et TEPCO avaient examiné sérieusement la question, il est probable que l’accident aurait pu être évité”.
Au total, 32 actions en justice impliquant environ 12 000 plaignants ont été intentées par des personnes déplacées pour obtenir une indemnisation de la part de TEPCo et du gouvernement. Dans 12 cas, les tribunaux ont reconnu que le gouvernement et la compagnie d’électricité avaient fait preuve de négligence. Dans les 11 autres cas, les tribunaux n’ont condamné que l’entreprise à verser des dommages et intérêts. La présente décision concerne les actions intentées devant les tribunaux de district des provinces de Fukushima, Gunma, Chiba et Ehimé et met un point final aux décisions rendues en mars par les tribunaux de grande instance, qui ont ordonné à TEPCo de verser des indemnités supplémentaires d’un montant total d’environ 1,45 milliard de yens à quelque 3 700 plaignants. Les décisions des hautes cours étaient partagées quant à la responsabilité du gouvernement. Les décisions rendues dans les procès de Fukushima, Chiba et Ehimé avaient conclu à la responsabilité du gouvernement, mais l’État n’était pas tenu de verser des indemnités dans le procès de Gunma.