Taïwan assouplit l’interdiction d’importation de produits alimentaires japonais

Taiwan a assoupli l’interdiction d’importation de produits alimentaires japonais des provinces de Fukushima, Ibaraki, Gunma, Tochigi et Chiba. Mais certains produits, comme les champignons et le gibier demeurent interdits. Cela devrait faciliter son accès à l’accord de libre échange transpacifique.

Les Etats-Unis et l’Union européenne lèvent des restrictions à l’importation de produits alimentaires du Japon

Les Etats-Unis ont décidé de lever les restrictions à l’importation de produits alimentaires en provenance de 14 provinces japonaises qui avaient été affectées par les retombées radioactives durant l’accident nucléaire à la centrale de Fukushima daï-ichi. Mentionnant des mesures de contrôle rigoureuses, l’administration américaine des denrées alimentaires et des médicaments, a estimé que le risque était très faible pour les Américains qui consommeraient des aliments contaminés par la radioactivité importés du Japon. Voir son communiqué en anglais.

Les 14 provinces où des restrictions étaient en place sont Fukushima, Aomori, Iwaté, Miyagi, Yamagata, Ibaraki, Tochigi, Gunma, Saitama, Chiba, Niigata, Yamanashi, Nagano et Shizuoka.

L’Union européenne a aussi décidé récemment de modifier ses règles d’importation de produits alimentaires en provenance du Japon (document en pdf). Elle maintient les limites maximales de radionucléides sur les valeurs établies par la législation japonaise en vigueur, qui sont plus strictes que les normes européennes. Elle considère aussi que l’obligation d’échantillonner et d’analyser les produits avant leur exportation vers l’Union doit être maintenue ou établie pour certains produits, mais peut être levée pour d’autres. La liste est notamment étendue aux champignons sauvages et à leurs produits dérivés originaires des préfectures d’Iwate, Nagano, Niigata et Ibaraki, aux poissons et produits de la pêche originaires de la préfecture de Gunma, à la fougère grand aigle sauvage et à ses produits dérivés originaires de la préfecture de Fukushima et à la fougère royale japonaise et à ses produits dérivés originaires de la préfecture de Miyagi. Par contre, cette obligation peut être levée pour les pousses d’Aralia et leurs produits dérivés originaires des préfectures de Fukushima, Miyagi et Gunma, les bambous et leurs produits dérivés originaires de la préfecture de Fukushima, les champignons et leurs produits dérivés originaires de la préfecture de Gunma, le koshiabura et ses produits dérivés originaires des préfectures de Shizuoka, Yamanashi et Yamagata.

L’UE note aussi que “les contrôles officiels effectués à l’entrée dans l’Union montrent que les conditions particulières prévues par le droit de l’Union sont correctement mises en œuvre par les autorités japonaises et aucun cas de non-conformité au droit de l’Union n’a été constaté lors des contrôles officiels des importations depuis plus de neuf ans. Par conséquent, il y a lieu de conserver la fréquence peu élevée des contrôles officiels à l’entrée dans l’Union des denrées alimentaires et des aliments pour animaux soumis au présent règlement.”

Ces restrictions ne s’appliquent pas aux produits contenus dans les bagages personnels de passagers et destinés à leur consommation personnelle ou à leur usage personnel.

Le règlement d’exécution contient la liste de tous les produits pour lesquels des restrictions demeurent.

Enfin, selon le Japan Times, le Japon fait pression sur Taiwan pour que le pays lève aussi ses restrictions concernant 5 provinces japonaises, s’il veut rejoindre l’accord de libre-échange du Partenariat Trans-Pacifique.

Le rejet en mer se fera à un kilomètre via un tunnel sous-marin

TEPCo prévoit de creuser un tunnel sous-marin jusqu’à 1 km du rivage pour rejeter l’eau contaminée, pardon “traitée”, dans l’océan afin de permettre une meilleure dilution. Rappelons que cette eau sera déjà diluée en amont, avant rejet, de façon à avoir moins de 1 500 Bq/L de tritium, même si les contrôles ne seront faits qu’a posteriori. L’eau utilisée pour la dilution ne sera pas pompée dans le port, qui est contaminé, mais à proximité du réacteur n°5.

Un tunnel serait plus robuste qu’un simple tuyau en cas de séisme ou tsunami. Il devrait faire 2,5 m de diamètre. Les investigations géologiques devraient commencer en septembre et les travaux pourraient durer jusqu’en 2023. Les rejets ne débuteront qu’après cette date. Le coût d’un tel projet n’est pas donné. Voir ce document en anglais (copie) et celui-ci en japonais pour avoir des informations un peu plus détaillées.

TEPCo et le gouvernement espèrent ainsi réduire les “rumeurs néfastes” qui pourraient affecter les produits de la mer (lire le communiqué en anglais de TEPCo). Le but est plutôt de réduire la contamination près de la côte, mais ce mot est tabou ! Il s’agit, surtout, d’éloigner les rejets des prises d’eau de mer afin de ne pas repomper du tritium dans l’eau utilisée pour diluer le tritium des cuves.

Le gouvernement a aussi annoncé qu’il achèterait les invendus de la pêche pour les congeler si les ventes diminuent à cause de la “désinformation”. Pour les produits qui ne peuvent pas être congelés, il trouvera de nouveaux marchés. Le montant du fond d’aide et les conditions pour en bénéficier restent à déterminer. Et si ces efforts ne suffisent pas, TEPCo indemnisera les pêcheurs.

TEPCo s’était engagée à compenser les éventuelles baisses dans les ventes en faisant des études statistiques sur les marchés et en prenant en compte la crise sanitaire, comme l’explique l’Asahi. Voir aussi ce document en japonais. D’une manière générale, jusqu’à présent, c’est TEPCo qui indemnisait les pertes de revenus, mais la compagnie rechignait souvent à mettre la main à la poche, refusant même parfois de suivre les recommandations de la commission de conciliation. Les pêcheurs n’avaient donc pas confiance dans les promesses de TEPCo. Et donc, à la fin, ce sont les contribuables qui vont prendre en charge une partie des coûts éventuels qui auraient incomber à l’exploitant, comme le souligne l’Asahi.

Le gouvernement met aussi en avant les contrôles de l’AIEA qui seront faits de manière transparente. Cette agence de l’ONU n’a jamais rien trouvé à redire de l’action du Japon depuis le début de la catastrophe, même quand il minimisait le niveau de l’accident durant les premiers mois. Il n’y a donc rien à en attendre.

Le gouvernement avait déjà tenté, à l’aide d’une grande agence de communication, Dentsu, de faire passer le tritium pour un mignon petit poisson, ce qui avait fait scandale. La lutte contre les “rumeurs néfastes” n’est pas facile ! D’autant plus que l’on ne construit pas un tunnel sous-marin pour lutter contre ces rumeurs. C’est complètement ridicule. Il serait temps de bien nommer les choses afin de permettre le débat sur le sujet sans systématiquement stigmatiser les personnes qui expriment des inquiétudes.

En juillet dernier, TEPCo a publié une brochure d’une trentaine de pages en anglais qui présente 10 années d’efforts pour gérer l’eau contaminée. Cela vient compléter le portail internet dédié.

Les Jeux de la reconstruction ?

Le gouvernement japonais voulait faire des JO, les Jeux de la reconstruction et montrer au monde les progrès réalisés dans les zones sinistrées par la triple catastrophe et lutter contre les “rumeurs néfastes”. Mais, avec la pandémie et l’absence de spectateurs lors des évènements sportifs, peu de touristes iront dans le Tôhoku.

De la nourriture de Fukushima est servie au village olympique, mais personne n’en a entendu parlé en dehors, peut-être, des délégations…

Premier repiquage de riz à Futaba en 10 ans

Futaba, qui héberge la centrale de Fukushima daï-ichi avec Ôkuma, est l’une des communes les plus touchées par la catastrophe nucléaire. La population y est toujours évacuée. Mais les autorités veulent toujours reconquérir les territoires perdus. Du riz vient d’y être repiqué pour la première fois en 10 ans. C’est la dernière commune de Fukushima où de tels essais sont effectués.

Seule une toute partie du territoire devrait rouvrir afin de maintenir l’existence de la commune, avec seulement 978 m2 de rizière prévus.

La voie navigable E40 retirée des projets stratégiques de la zone d’exclusion de Tchernobyl

Le projet de voie navigable E40 reliant la Mer Noire à la Baltique, doit emprunter la Pripyat et traverser la zone d’exclusion de Tchernobyl. Les travaux prévus et l’entretien devraient avoir un impact radiologique non négligeable pour les populations vivant en aval et qui consomment l’eau du Dniepr, selon la première étude d’impact effectuée par l’ACRO il y a un an. Le projet devrait aussi avoir un impact sur la biodiversité de la Polésie, la plus grande zone humide d’Europe.

Selon le collectif Save Polesia, l’Agence nationale de gestion de la zone d’exclusion a retiré le projet E40 de son plan stratégique de développement de la zone d’exclusion, ce qui est une bonne nouvelle. Ce plan est soumis à la consultation publique.

Le riz de Fukushima a encore du mal à se vendre

Les consommateurs boudent encore le riz cultivé à Fukushima et un peu plus de 60% de la production est écoulée dans les restaurants, les bentô… C’est plus que la moyenne nationale qui est de 40%, selon le ministère de l’agriculture. La crise sanitaire et les fermetures de restaurants ont réduit les débouchés et le riz de Fukushima, plus dépendant, a plus souffert. Plutôt que de baisser les prix, la fédération des agriculteurs de Fukushima, qui rassemble environ 2 000 producteurs, a préféré donner les surplus à des organisations caritatives.

Le Maïnichi rapporte qu’une tonne de riz de Fukushima a été livrée à des associations qui fournissent des repas gratuits aux enfants d’Ôsaka où la fermeture des écoles a entraîné une augmentation de la demande.

A lire : Tchernobyl par la preuve, de Kate Brown

En ce jour du 35ème anniversaire de la catastrophe nucléaire de Tchernobyl, nous ne saurions trop recommander la lecture de Tchernobyl par la preuve, de l’historienne Kate Brown, dont la version française vient de paraître. Il s’agit du fruit d’un gigantesque travail d’analyse des archives soviétiques de l’époque qui met en évidence l’étendue du désastre, mais aussi les actions entreprises pour dissimuler la vérité et convaincre la communauté internationale et l’opinion publique de l’innocuité des retombées radioactives. Mais, suite à l’effondrement du système soviétique, des scientifiques ont tenté d’étudier, de documenter l’ampleur de la catastrophe et d’alerter.

Les puissances nucléaires occidentales, qui avaient exposées des populations aux retombées radioactives lors des essais nucléaires, avaient tout intérêt à accepter ce déni. Elles lui ont donné un verni de respectabilité via les agences de l’ONU. Comme l’explique l’auteure à AOC, “Tchernobyl est un scandale bien plus grand qu’on ne le dit. Ce n’était pas seulement une opération d’occultation soviétique, mais bien une initiative internationale. Et c’est pourquoi c’est si important pour nous aujourd’hui de nous pencher encore sur cette catastrophe.”

Une synthèse magistrale à lire absolument :

Un séminaire récent donné par Kate Brown à The University of British Colombia est disponible sur Youtube en anglais :

Le Japon suspend la pêche du sébaste noir

Les autorités japonaises viennent de suspendre la pêche au sébaste noir (kurosoï en japonais), après qu’un spécimen dépassant la contamination maximale autorisée ait été pêché au large de Minami-Sôma. C’est la première fois en 14 mois qu’une telle mesure est prise.

Le spécimen pêché le 1er avril (!) avait une contamination en césium de 270 Bq/kg alors que la limite autorisée est de 100 Bq/kg. D’autres sébastes dépassant la limite avaient aussi été capturés en février dernier. Comme les pêcheurs appliquent une limite plus stricte, fixée à 50 Bq/kg, ils avaient déjà suspendu la commercialisation de cette espèce.

Les dernières restrictions sur la pêche avaient été levées en février 2020 et les pêcheurs de Fukushima avaient capturé 3 tonnes de sébastes noirs en 2020, soit moins de 1% de leur prises.

Décontamination des territoires évacués : quel bilan ?

A Tchernobyl, les autorités soviétiques ont abandonné de vastes territoires et le réacteur accidenté. L’Europe a financé la construction d’une arche gigantesque destinée à limiter l’impact d’un effondrement dans le bâtiment réacteur pendant au moins un siècle. Des centaines de travailleurs interviennent toujours dans la zone, chaque jour et la pollution radioactive continue de se disséminer. La Pripyat, qui traverse la zone d’exclusion, déverse la pollution radioactive dans le Dniepr qui sert à l’alimentation en eau potable de Kiev et à l’irrigation des cultures de toute la plaine jusqu’à la Mer Noire. Les épisodes réguliers d’inondation provoquent des pics de contamination de l’eau et le projet dément de voie navigable transeuropéenne E40 devrait aggraver l’impact radiologique, comme l’ACRO l’a montré.

A l’inverse, les autorités japonaises se sont lancées dans une politique de reconquête totale : les réacteurs accidentés vont être démantelés et les territoires contaminés rendus à leurs habitants. Et donc un vaste programme de décontamination a été lancé. Même pour les zones dites de retour difficile, des oasis décontaminés seront créés pour que les communes les plus affectées ne soient pas rayées de la carte. Il est important de garder à l’esprit que seules les zones habitées et agricoles ont été décontaminées. Ni les forêts, ni les montagnes, qui couvrent environ 70% de la province de Fukushima, ne le seront. Malgré ces restrictions, les travaux auraient déjà coûté 5 600 milliards de yens (43 milliards d’euros au cours actuel) pour un faible taux de retour des populations dans les zones où les ordres d’évacuer ont été levés, comme on peut le lire dans le bilan chiffré effectué pour le 10ème anniversaire. Parmi les raisons invoquées pour ne pas revenir, il y a la contamination résiduelle qui est trop élevée.

Dans les zones évacuées, c’est le ministère de l’environnement qui a la responsabilité des travaux et, selon cet article du Japan Times, il n’a pas l’habitude de mener à bien de grands projets. Il a donc chargé des majors du BTP de coordonner les travaux, sans véritable contrôle. Ce type de travail génère normalement une marge bénéficiaire de 5 %, mais dans ce cas, elle était d’environ 10 %. En conséquence, il y a eu des détournements de fonds car le ministère de l’environnement manquait de personnel pour contrôler. Et le gouvernement a toujours refusé de lui allouer plus de contrôleurs, sous prétexte que la décontamination n’était qu’un projet à court terme.

Toujours selon le Japan Times, le ministère avait prévu de ne construire que deux incinérateurs pour brûler les déchets organiques, mais les autorités locales ont déclaré qu’elles n’autoriseraient l’incinération que des déchets collectés à l’intérieur de leurs frontières, si bien que le ministère a fini par construire 16 incinérateurs dans la seule province de Fukushima (lire notre reportage sur le sujet). Et bien qu’ils aient été construits pour durer 20 ans, la moitié d’entre eux ont depuis été démantelés afin d’apaiser les inquiétudes locales, de sorte que dans de nombreuses régions, les travaux n’ont pas été achevés. Ainsi, le coût de l’incinération des déchets a fini par être plus de cinq fois supérieur à l’estimation initiale.

Quant aux sols contaminés, qui ne peuvent pas être incinérés, ils sont transportés vers un site d’entreposage de 16 km2 tout autour de la centrale accidentée, situé sur les communes de Futaba et d’Ôkuma. Ces déchets doivent être retirés du centre d’entreposage avant 2045, selon la loi, car le gouvernement a promis que tout le monde pourrait rentrer, à condition de vivre assez longtemps… Le stock de déchets attendu sur le site d’entreposage est de 14 millions de mètres cube. Difficile de trouver un ou plusieurs sites définitifs en dehors de Fukushima, comme prévu par la loi. Le gouvernement veut donc “recycler” 80% environ de ce stock, quand la contamination en césium-137 sera passée sous le seuil de 8 000 Bq/kg, en utilisant ces sols pour la construction de routes, digues, etc…

Après avoir dépensé des milliards d’euros pour collecter cette pollution et la rassembler sur un site unique, les autorités japonaises vont donc dépenser des milliards en plus pour la redisperser. Drôle de logique !

Le gouvernement devrait publier d’ici mars 2025 des directives sur les sites où ces sols peuvent être utilisés et sur la manière de les gérer. En revanche, il n’a fait aucune mention du processus de sélection des sites candidats pour le stockage définitif des 20% les plus contaminés, sous le prétexte que l’on ne connaît toujours pas les quantités exactes.

Des expériences sont en cours sur l’utilisation des terres radioactives. C’est le cas notamment dans le district de Nagadoro d’Iitaté, qui est toujours classé en zone de retour difficile. Selon le Maïnichi, 430 000 tonnes de sols radioactifs devraient y être étendus sur 34 ha de terres agricoles. Depuis 2018, le ministère de l’environnement y mène aussi des expériences sur la réhabilitation de l’agriculture en y plantant des légumes, des fleurs et des céréales. Jusqu’à maintenant les céréales étaient détruites, mais le gouvernement envisage de les mettre sur le marché car la contamination est inférieure à la limite maximale admissible, fixée à 100 Bq/kg.

Ailleurs, la réutilisation des sols contaminés n’est pas gagnée puisque, comme le souligne l’Asahi qui a interrogé les gouverneurs, aucune autre province du Japon n’accepte pour le moment. Les gouverneurs de Yamagata, Yamanashi, Nagasaki, Kagoshima et Okinawa sont contre toute réutilisation sur leur territoire. Le gouverneur de Shizuoka y est opposé pour les terrains agricoles et celui de Shiga pour la construction de routes. Tous les autres gouverneurs sont restés prudents, invoquant des doutes sur la sécurité du sol ou préférant ne pas répondre…

Huit gouverneurs ont rejeté l’idée d’accueillir le centre de stockage définitif. Les autres n’ont pas voulu se prononcer, au prétexte que le processus de sélection du site n’est pas connu.