Le Japon est-il prêt à faire face à une nouvelle catastrophe nucléaire ?

Les séismes qui continuent de secouer l’île de Kyûshû ont mis en évidence des failles dans la gestion des catastrophes naturelles. Si une catastrophe nucléaire était venue s’y ajouter, est-ce que la gestion de la crise aurait été meilleure qu’en 2011 ? La réponse est fort probablement négative.

En cas de catastrophe, ce sont les personnes vulnérables qui payent le plus lourd tribut. Des centres d’accueil spécialisé pour les personnes handicapées ou les personnes âgées qui ont besoin de soins étaient prévus, mais le système est un échec à Kumamoto, où il y a quelques 35 000 personnes enregistrées comme ayant besoin d’aide spécifique. 176 institutions avaient signé un accord pour les accueillir, mais qu’un très petit nombre n’a pu ouvrir. Parfois, le bâtiment a été détruit, d’autres fois, il manquait du personnel ou l’eau était coupée. Le 24 avril dernier, seulement 34 centres d’accueil spécialisé ont pu ouvrir et il y avait 104 personnes hébergées sur 1 700 dans le besoin.

Face à la pénurie, les autorités locales se sont bien gardées de mentionner ces centres d’accueil et c’est du personnel médical en tournée dans les autres centres de secours qui a déterminé qui devait y être transféré. On peut imaginer qu’avec une contamination radioactive, ce sera encore plus complexe à gérer.

Par ailleurs, un audit vient de révéler que 106 centres d’accueil spécialisé en cas d’accident nucléaire sur 140 à travers tout le pays n’a pas de stock de nourriture suffisant… Ces centres, situés dans la zone de préparation à l’urgence d’un rayon de 30 km autour des centrales nucléaires, ont reçu une aide financière pour pouvoir tenir de 2 à 7 jours avant d’évacuer. Cela consiste à installer des équipements pour faire augmenter la pression dans le bâtiment afin de prévenir l’entrée de contaminants radioactifs ou de groupes électrogènes pour l’électricité. Mais l’aide financière gouvernementale, d’un total de 24,6 millions de yens de 2013 à 2015, n’inclut pas la nourriture ou le fuel. Résultat, le stock de nourriture est insuffisant pour 106 centres, soit 76%, et celui de fuel pour 59 centres. Le gouvernement va donc débloquer des fonds supplémentaires.

Pour les autres personnes, les réflexes à avoir en cas d’accident nucléaire, à savoir se mettre à l’abri, sont contradictoires avec ceux pour se protéger en cas de séisme, à savoir sortir. Une voiture ne protège presque pas des radiations ambiantes. Les autorités doivent clarifier leur priorité en cas d’accident complexe associé à un séisme. Si l’habitation est détruite par le séisme, la question ne se posera pas et il faudra s’enfuir, si possible. Certains villages de Kumamoto sont restés isolés suite aux glissements de terrain.

Autour de la centrale de Sendaï à Kagoshima, la seule en activité, il faudrait 29 heures pour évacuer toute la population habitant à moins de 30 km, en supposant que celle à moins de 5 km part en premier et que les autres attendent leur tour à l’abri. S’il n’y a pas d’abri et que tout le monde part en même temps, les routes seront congestionnées et le temps d’évacuation plus long.

Lire nos rapports sur les plans d’urgence.

A Kumamoto, il y a encore 80 000 personnes déplacées en tout, dont 41 000 dans des centres d’hébergement. Beaucoup dorment dans leur voiture. 97 personnes ont déjà dû être hospitalisées pour une thrombose veineuse, parfois appelée syndrome de la classe économique. Comme nous l’avons expliqué, c’est souvent lié une position immobile prolongée dans un espace exigu. Il y a aussi des risques d’infection dans les abris.

Le nombre total de décès est de 63, dont 14 indirects liés à l’évacuation.