Décontamination et gestion des déchets : un chantier titanesque

Le ministère de l’environnement a mis en ligne son dernier bilan en anglais sur l’avancement du titanesque chantier de décontamination et sur la gestion des déchets engendrés. Les premières pages sont des rappels sur la politique mise en œuvre et le zonage effectué, comme nous l’avons expliqué ici. L’avancement des travaux par commune évacuée est présenté à la page 9. Il apparaît que les travaux de décontamination ne sont terminés que dans 4 communes sur 11 : Tamura, Kawauchi, Naraha et Ôkuma. Pour cette dernière, il s’agit seulement de la petite zone où la contamination n’est pas trop élevée. Pour les deux premières, l’ordre d’évacuation a été levé. Ailleurs, c’est « work in progress ». Même chose pour le site d’entreposage provisoire des déchets dans chaque commune. Les travaux devraient être terminés cette année à Kawamata et Katsurao.

A partir de la page 14, il y a un graphe avec l’impact de la décontamination à Naraha : le débit de dose a diminué de 46% dans les zones résidentielles, de 39% sur les terrains agricoles, 26% dans les forêts et 44% sur les routes. Ce n’est pas beaucoup. Mais cette commune, située à moins de 20 km de la centrale, n’a pas été la plus touchée. L’exposition externe y était inférieure à 20 mSv/an avant les travaux. Ces chiffres sont assez similaires à Tamura, page 20. Rappelons que les travaux de décontamination ne sont effectués qu’à proximité des zones de vie.

A partir de la page 23, est présenté l’avancement des travaux de décontamination dans les zones non-évacuées, là où l’exposition externe peut être comprise entre 1 et 20 mSv/an. 41 communes étaient initialement concernées dans la province de Fukushima. Elles ne sont plus que 39 grâce à la diminution naturelle de la radioactivité. Les travaux de décontamination ne sont pas terminés. Dans 3 communes, le plan de décontamination n’est même pas prêt.

Dans sept autres provinces touchées, ce chiffre est passé de 63 à 60 communes. Dans 19 d’entre elles, situées à Ibaraki et Gunma, les travaux de décontamination seraient terminés et dans 29 autres, « presque terminés ».

Le document rappelle ensuite que le but des travaux de décontamination n’est pas de ramener l’exposition externe sous la limite pré-catastrophe de 1 mSv/an, car ce n’est pas possible. C’est pourquoi les autorités tentent de promouvoir une culture de sûreté et l’utilisation de dosimètres individuels pour apprendre à limiter la dose effectivement reçue, comme nous l’avons déjà expliqué. Page 29, des doses enregistrées pour des enfants de Daté sont placées sur un graphe : plusieurs d’entre eux ont reçu une dose supérieure à 1 mSv/an. Aucune mention n’est faite de l’écart dû aux seuls instruments de mesure, comme nous l’avions révélé.

Au-delà des zones de vie, il n’y a pas de travaux de décontamination. A partir de la page 38, il est mentionné que des recherches sont faites pour évaluer l’impact des forêts contaminées. De même pour les cours d’eau, lacs, bassins… car l’eau atténue les rayonnements. Dans ce dernier cas, il est juste prévu d’améliorer la communication pour que le public ait une perception appropriée des risques (sic).

Enfin, à partir de la page 41, le ministère présente sa politique de gestion des déchets engendrés par ces chantiers. A Fukushima, il est prévu un centre d’entreposage sur 16 km2 tout autour de la centrale de Fukushima daï-ichi (voir la carte page 48) pour un volume de déchets de l’ordre de 22 millions de mètres cube. Le graphe de la page 47 montre qu’il s’agit surtout de sols qui sont, pour moitié environ, contaminés entre 8 000 et 100 000 Bq/kg et pour l’autre moitié, à plus de 100 000 Bq/kg pour le césium radioactif. Rappelons que cet entreposage n’est prévu que pour 30 ans. Après, le gouvernement s’est engager à tout stocker définitivement en dehors de la province de Fukushima. A partir de la page 55, est présentée la stratégie pour y arriver. C’est, bien-entendu, complètement irréaliste. Comment trouver un site sur plusieurs kilomètres carrés et déplacer à nouveau plusieurs millions de mètres cubes ?

Pour le moment, même le centre provisoire n’avance pas et ce n’est pas dit dans le rapport. Seuls deux petits sites ont été aménagés, pour seulement 20 000 m3 de déchets. Seulement 3 000 m3 y ont été effectivement transférés depuis mars dernier. Deux autres sites devraient ouvrir prochainement, pour arriver à 40 000 m3. On est encore loin des 22 millions de m3 prévus ! Les négociations avec les 2 300 propriétaires de terrain n’avancent pas.

La recherche de site est bloquée dans les autres provinces et le document n’évoque pas ce problème. Rappelons qu’à Kami, dans la province de Miyagi, les habitants ont bloqué l’accès au site envisagé. Puis, avec l’arrivée de la neige, la route d’accès a été barrée. Elle vient juste de rouvrir, comme le rapporte le Maïnichi, mais les habitants semblent toujours aussi déterminés à faire barrage au projet.