Des “auto-évacués” rayés des listes officielles de personnes déplacées

Les “auto-évacués” qui ont quitté des zones contaminées de leur propre chef, sans y être obligé par les autorités, n’ont pratiquement bénéficié que d’une aide au logement qui a cessé en mars dernier. Un précédent ministre de la reconstruction avait estimé qu’ils étaient responsables de leur sort… Comme les autres évacués, ils sont aussi victimes de l’arbitraire des autorités.

Selon l’Asahi, les autorités ne prennent plus ces “auto-évacués” dans son décompte des personnes déplacées par la catastrophe nucléaire. Avant la cessation des aides au logement, le nombre de personnes déplacées diminuait de 3 000 à 4 000 chaque mois. Il a diminué de 9 493 entre mars et avril 2017, puis de 12 412 entre avril et mai de la même année. Ce nombre a diminué de 29 412 personnes entre mars et juillet 2017. Pourtant, nombre d’entre eux n’ont pas déménagé. Ils payent juste le loyer.

Cette politique montre que les autorités se désintéressent des personnes déplacées par la catastrophe nucléaire. C’est un sentiment d’abandon qui prévaut chez les personnes concernées. Même les ONG auront du mal à leur venir en aide si elles n’ont plus de statut. Il y a pourtant des mères célibataires parmi elles, qui ont besoin de soutien.

Quel avenir pour le réacteur n°2 de Tôkaï ?

La Japan Atomic Power Co. (JAPC) est un peu particulière : c’est une filiale de cinq grandes compagnies d’électricité qui exploitait trois réacteurs nucléaires et revendait la production aux maisons mères. TEPCo en est le premier actionnaire…

Son réacteur Tsuruga 1, situé dans la province de Fukui, tout comme Tôkaï 1, situé dans celle d’Ibaraki, ont été arrêtés définitivement. La compagnie n’a pas renoncé à redémarrer un jour le réacteur Tsuruga 2, bien que l’Autorité de Régulation Nucléaire, la NRA, ait estimé que la faille sismique qui passe en dessous est active. Cela interdit toute remise en service.

Il ne lui reste que le réacteur n°2 de Tôkaï, dans la province d’Ibaraki, qui est vétuste. La JAPC a déposé une demande d’autorisation pour le redémarrer et espère l’exploiter jusqu’à ses 60 ans, bien que cela relève de l’acharnement thérapeutique et, selon l’Asahi, TEPCo pourrait participer au financement des travaux alors que la compagnie ne peut même pas financer ses propres travaux de démantèlement et les indemnisations sans une aide financière de l’Etat. La décision sera prise en 2018.

La JAPC joue gros pour sa survie, mais il est loin d’être acquis qu’elle obtienne un feu vert des autorités. Alors les banques rechignent à lui prêter de l’argent. TEPCo et Tôhoku Electric, qui rachetaient le courant de Tôkaï pour le commercialiser, pourraient se porter garants, voire même prêter l’argent. Un vieux réacteur, qui a plus de 40 ans, avec des câbles à l’isolant inflammable et les investissements massifs nécessaires pour la remettre aux normes, est leur seul espoir de nucléaire, cela en dit long sur l’état de cette industrie au Japon…

Les élections pour le poste de gouverneur de la province d’Ibaraki viennent d’avoir lieu. Le gouverneur sortant, qui briguait un 7ième mandat afin de battre le record du Japon, malgré ses 71 ans, vient d’être battu par son principal concurrent, qui était soutenu par les partis de de la majorité gouvernementale. Le gouverneur défait avait fait de son opposition au redémarrage de Tôkaï 2 un de ses arguments électoraux. Mais cela n’a pas suffit. Le vainqueur a été très ambigu sur le nucléaire.

TEPCo n’est pas dans une situation plus favorable pour ses propres réacteurs. Le président de l’Autorité de Régulation Nucléaire a réaffirmé, dans une récente interview, qu’il s’opposerait au redémarrage de ses réacteurs tant que la compagnie n’aurait pas fait de progrès dans la maîtrise des réacteurs accidentés de Fukushima daï-ichi. Selon l’Asahi, un des maires locaux ne donnera son consentement au redémarrage des réacteurs 6 et 7 de la centrale de Kashiwazaki-Kariwa, située dans la province de Niigata, que si la compagnie ferme définitivement les réacteurs 1 à 5. Pense-t-elle avoir plus de chance avec le réacteur de Tôkaï ?

67ième versement financier pour TEPCo

TEPCo annonce avoir reçu le 67ième versement financier de la part de la structure gouvernementale de soutien qui lui avance de l’argent pour les indemnisations : 34,9 milliards de yens (266 millions d’euros). Cet argent est prêté sans intérêt.

TEPCo a déjà reçu un total de 7 554 milliards de yens (58 milliards d’euros au cours actuel) et cela ne suffira pas.

157 Marines américains qui avaient assisté le Japon en 2011 portent plainte contre TEPCo

157 US Marines ont saisi la justice américaine pour obtenir de TEPCo la création d’un fond d’indemnisation de 5 milliards de dollars afin de couvrir les frais médicaux découlant des dommages physiques, moraux et financiers qu’ils disent avoir subis. C’est la deuxième plainte de ce type aux Etats-Unis.

En 2011, ces Marines avaient participé aux opérations de secours après le tsunami et ont été contaminés par les rejets radioactifs de la centrale accidentée. Malades, ils sont convaincus que la radioactivité est à l’origine de leurs maux et demandent une compensation à TEPCo qui serait responsable de défauts de conception, de construction et de maintenance.

Gel complet du sol autour des réacteurs accidentés

Débuté en mars 2016, le gel du sol tout autour des quatre réacteurs accidentés de la centrale de Fukushima daï-ichi, s’est révélé ne pas être aussi efficace que prévu. Le 15 août dernier, l’Autorité de Régulation Nucléaire, la NRA, a donné son accord au gel des derniers 7 m restant.

Rappelons que ce projet a coûté 34,5 milliards de yens (267 millions d’euros) aux contribuables japonais afin de réduire les infiltrations d’eau souterraine dans les sous-sols des réacteurs où elle se mélange à l’eau de refroidissement, fortement contaminée. Il consiste en 1 568 tuyaux enfoncés jusqu’à 30 m de profondeur sur 1,3 km environ dans lesquels circulent un liquide refroidissant à -30°C. Les infiltrations étaient de 400 m3 par jour au début de la catastrophe et seraient de l’ordre de 140 m3 actuellement. TEPCo espère que le gel complet du sol va réduire plus ces infiltrations, sous les 100 m3 par jour. Les dernières données sur les flux pompés sont ici. Selon l’Asahi, la NRA a de sérieux doute sur l’efficacité de ce “mur gelé” et estime que les pompages dans la nappe phréatique sont bien plus efficaces.

Le gel de la dernière section a débuté le 22 août et devrait prendre beaucoup plus de temps que pour les autres sections à cause des forts courants dans cette zone. Pour l’occasion, TEPCo a publié une série de photos accompagnées de quelques explications succinctes. Cette section, de 7 m de long, est située en amont des réacteurs, à l’Ouest donc, vers les réacteurs n°2 et 3. Le gel devrait être achevé cet automne.

En attendant, l’eau pompée qui n’est pas réinjectée pour le refroidissement est partiellement décontaminée et stockée dans des cuves. Les dernières données de TEPCo font apparaître un volume total d’eau traitée de 804 376 m3 auquel il faut ajouter 192 409 m3 d’eau partiellement traitée (retrait du strontium seul) et quelques 55 000 m3 dans les sous-sols des différents bâtiments.

Territoires évacués : peu de retour beaucoup de problèmes

En mars dernier, les autorités ont levé les derniers ordres d’évacuer, sauf dans les territoires dits de “retour difficile”. Pour les autorités, l’année 2017 devait être l’année du grand retour, mais les populations concernées ne sont pas aussi enthousiastes : les victimes de la catastrophe nucléaire sont aussi victimes de l’arbitraire des autorités. Force est de constater que le taux de retour reste très faible et que les personnes qui sont rentrées font face à de nombreuses difficultés.

A Tomioka, il y avait 13 300 habitants avant la catastrophe. Selon le Maïnichi, seuls 200 sont rentrés et à peine 400 sont venus assister aux feux d’artifice tirés le 11 août dernier. A Iitaté, seulement 466 personnes étaient rentrées au 1 août, sur 5 977, selon le Yomiuri.

Parmi les difficultés rencontrées par les personnes qui sont rentrées, il y a la présence d’animaux sauvages dans les lieux de résidence, dont des sangliers. Alors on met du grillage autour des propriétés pour prévenir la pénétration des animaux. “Mettre les humains en cage semble être une blague”, a expliqué au Maïnichi une personne rentrée à Namié, “mais je suis contente si la barrière maintient les sangliers éloignés”. Ces barrières de 1,2 m de hauteur, sont un des projets tests mis en place par les autorités pour répondre à l’inquiétude des résidents. En cas de succès, c’est toutes les zones résidentielles qui pourraient être grillagées. D’autres animaux se sont installés dans les maisons abandonnées.

Révision du plan stratégique énergétique

Le ministre de l’industrie a ouvert les discussions de révision du plan stratégique énergétique du Japon, en précisant que les fondamentaux resteraient inchangés. Pourtant, le plan actuel, qui date de 2015, est complètement irréaliste : il prévoit que la part du nucléaire sera de 20 à 22% en 2030, ce qui correspond à une trentaine de réacteurs, alors que seuls 5 sur 54 avant la catastrophe ont redémarré. Cela signifie aussi étendre leur durée de vie ou en construire de nouveaux. Il y a un an, lors des premières discussions, il était pourtant question de réduire la part du nucléaire… La part du nucléaire dans la production d’électricité était 29% en 2010.

Lors d’une récente réunion de travail, le village nucléaire en a profité pour réclamer la construction de nouveaux réacteurs, alors que c’est une industrie moribonde au Japon et que la population y est opposée. Le ministre y est aussi opposé car il sait que ce n’est pas tenable politiquement. Il préfère favoriser le redémarrage des réacteurs actuels.

D’ailleurs, le système de financement actuel encourage la prolongation de la durée des réacteurs alors que la loi stipule que la durée de vie d’un réacteur est de quarante ans, sauf exception. Selon le Japan Times, les communes qui hébergent des réacteurs de plus de 40 ans ont droit à 100 millions de yens supplémentaires par an. Le Japon a plusieurs réacteurs de plus de 40 ans : un a été détruit à Fukushima, 5 vont être démantelés (Mihama 1 et 2 à Fukui et Tsuruga 1 à Fukui, Shimané 1 et Genkaï 1 à Saga) et une demande de prolongation a été acceptée pour les réacteurs 1 et 2 de Takahama, ainsi que le 3 de Mihama. Ce système de soutien financier supplémentaire date de 2010. Il va être difficile de revenir en arrière, mais ce point ne sera pas abordé dans la révision du plan stratégique.

Par ailleurs, le plan actuel fait la part belle au charbon, malgré les timides engagements du Japon au sommet de Paris sur le climat, dont il fini par ratifier l’accord après avoir traîné des pieds. Il y a environ 150 centrales à charbon au Japon, qui fournissent environ 32% de l’électricité. C’est déjà plus que l’objectif fixé pour 2030. Pourtant, une quarantaine de nouvelles centrales à charbon sont en projet actuellement. Le précédent ministre de l’environnement a dû rappeler que le Japon ne pourra jamais atteindre ses objectifs de réduction de gaz à effet de serre et avait demandé une réévaluation du projet de Taketoyo Thermal Power Station dans la province d’Aïchi et la fermeture d’anciennes centrales.

Par ailleurs, des citoyens continuent d’investir dans les énergies renouvelables. Il y a désormais un millier d’installations mises en service avec le soutien des riverains, selon le Maïnichi. C’est dans la province de Nagano qu’il y en a le plus. Leur production atteindrait 89 MWhe. D’autres projets sont en cours de développement. Mais les compagnies d’électricité rechignent à racheter ce courant comme elles le devraient, ce qui freine le développement de ces projets. C’est un sujet qui pourrait être abordé par le nouveau plan stratégique…

Une bombe datant de la seconde guerre mondiale retrouvée dans les environs de la centrale de Fukushima

C’est lors d’un chantier d’agrandissement d’un parking situé à environ 1 km des réacteurs accidentés de la centrale de Fukushima daï-ichi qu’une bombe datant de la seconde guerre mondiale a été découverte. Les démineurs l’ont retirée sans problème.

Le site abritait une base de l’armée japonaise et a été massivement bombardé par l’armée américaine.

Environ 190 véhicules trop contaminés lors de l’accident à la centrale de Fukushima mis en circulation

Lors de l’accident nucléaire, en mars 2011, il y avait environ 1 700 véhicules sur le site de la centrale. Environ 600 d’entre étaient des véhicules privés ou appartenant à des sous-traitants. Tous ont été contaminés et ont pu être utilisés pendant 12 jours sans aucun contrôle. Le contrôle de la contamination n’a débuté que le 23 mars.

En février 2012, le ministère de l’industrie a demandé un suivi de ces véhicules afin qu’ils ne soient pas vendus sans que les acheteurs sachent qu’ils sont contaminés. TEPCo a mené l’enquête auprès de ses employés et sous-traitants et il est apparu qu’environ 460 véhicules ont quitté le site de la centrale en avril 2015. 190 d’entre eux avaient une contamination qui dépasse la limite fixée par les autorités (non donnée dans les médias), parfois même avec un facteur 10. TEPCo a récupéré ces véhicules auprès des propriétaires et les entrepose sur le site de la centrale accidentée et réfléchit à une filière de stockage pour ces déchets radioactifs particuliers. Certaines voitures avaient été vendues et deux restent introuvables.

Retour sur les microparticules vitreuses riches en césium

La NHK, qui est la télévision publique japonaise, a, en juin dernier, diffusé une émission consacrée aux microparticules vitreuses riches en césium retrouvées dans l’environnement proche et éloigné de la centrale de Fukushima (lien vers l’émission en japonais). L’association “Nos voisins lointains 3.11” a retranscrit cette émission avant de traduire le texte en français. C’est disponible en trois épisodes sur son site Internet : épisode 1, épisode 2 et épisode 3.

L’émission de la NHK fait référence à des études scientifiques que nous avons déjà mentionnées sur ce blog, en février et juin 2016. Suite à l’intérêt des médias français, l’IRSN y avait même consacré une note. Il ressortait de tout cela que ces microparticules, détectées jusqu’à Tôkyô, n’étaient pas connues avant cette catastrophe et que leur origine fait débat. Comme elles sont riches en césium et pas solubles, leurs impacts environnemental et sanitaire diffèrent des rejets gazeux. Sous cette forme particulaire, le césium est moins lessivé par les eaux et reste plus longtemps dans l’environnement. En cas de contamination interne par inhalation ou ingestion, il reste plus longtemps dans le corps humain, ce qui augmente son impact. Mais, il est difficile d’être plus précis.

Il ressort de l’émission de la NHK, qu’un an plus tard, on n’a pas beaucoup progressé sur le sujet des impacts. En revanche, il apparaît qu’il y aurait deux types de microparticules, nommés A et B dans le reportage, qui n’ont pas été dispersées de la même manière car elles n’ont pas été trouvées dans les mêmes zones géographiques. Il apparaît aussi qu’il y a eu une remise en suspension de ces particules lors des rejets de poussières particulièrement élevés de l’été 2013 consécutifs au déblaiement des débris sur le haut du réacteur n°3. Ce n’est qu’en décembre 2014 que l’on avait appris que c’était dû à des négligences de TEPCo qui avait alors renoncé à asperger des résines fixatrices.

Le reportage mentionne aussi une étude menée dans 27 bâtiments situés en zone dite de retour difficile. Il apparaît que ces microparticules ont été retrouvées dans l’ensemble de ces bâtiments. Il est aussi fait mention d’une microparticule de 200 micromètres environ qui contenait 60 Bq de césium137+134 au moment de l’accident, ce représente une très forte concentration. En cas d’inhalation, quel serait son impact sur la santé ? En effet, elle concentre les radiations en un point et est plus difficilement éliminée.

Seraient d’abord concernés par ces découvertes, les travailleurs présents sur le site de la centrale de Fukushima daï-ichi dans les jours qui ont suivi l’accident. La contamination des poumons a décru moins vite que pour les autres organes. Ces sont ces microparticules qui sont soupçonnées. Qu’en est-il pour les personnes qui rentrent dans les territoires évacués ?