Doses prises par le personnel à Fukushima daï-ichi

TEPCo a mis en ligne les dernières données relatives aux doses prise par le personnel sur le site de la centrale accidentée de Fukushima daï-ichi. Les données précédentes sont là.

9 201 personnes auraient été exposées aux rayonnements durant leur travail en avril 2017, et 8 862 en mai de la même année. Il y a, à chaque fois, près de 89% de sous-traitants (soit 8 148 en avril et 7 899 en mai), qui prennent l’essentiel de la dose. En moyenne, elle est trois plus élevée que celle prise par les employés de TEPCo.

La dose externe la plus forte est de 11,40 mSv en un mois, alors que la limite moyenne annuelle est de 20 mSv. Et ils sont 5 à avoir pris une dose supérieure à 10 mSv en un mois.

Depuis le 1er avril 2016, 16 465 personnes, dont 14 764 sous-traitants, auraient été exposées aux rayonnements durant leur travail et la dose effective la plus élevée est de 47,28 mSv depuis cette date. Ils sont 346 à avoir pris une dose supérieure à 20 mSv depuis cette date, qui est la limite annuelle pour les travailleurs en France et ce sont tous des sous-traitants.

Depuis la remise des compteurs à zéro en avril 2016, les sous-traitants ont pris une dose collective de 50,2 Sv.hommes et les employés de TEPCo de 2,4 Sv.hommes. Les sous-traitants encaissent donc une dose collective 20 fois plus élevée que les salariés de la compagnie.

Les sous-traitants sont généralement en CDD et perdent leur emploi une fois la dose limite proche d’être atteinte. Quel sera leur suivi à long terme ?

TEPCo publie aussi des données relatives à la dose à la peau et à la cornée.

Troisième séjour à l’hôpital pour une cure de décontamination pour les 5 personnes exposées au plutonium

Les 5 personnes exposées à une contamination au plutonium suite à l’éclatement un sac contenant du combustible MOx ont été à nouveau admis au NIRS pour une troisième cure de décontamination. La dernière fois, du plutonium avait été trouvé dans leurs urines. On ne sait pas ce qu’il en est actuellement.

Par ailleurs, la Japan Atomic Energy Agency (JAEA) pense que c’est une résine en décomposition qui est à l’origine des gaz qui ont provoqué l’éclatement. Selon l’Asahi, cette résine est utilisée pour fixer le combustible et sa décomposition serait liée à son exposition aux rayonnements.

Départ du combustible MOx vers le Japon dans un contexte d’échec de la politique dite de recyclage

Alors que 8 tonnes de combustible MOx quittent le port de Cherbourg à destination de la centrale de Takahama au Japon, qui vient juste d’être remise en service après une longue bataille judiciaire, cette politique d’extraction et de réutilisation du plutonium au Japon ne semble avoir aucun avenir. Le transfert vers le port s’est fait sous un dispositif de sécurité impressionnant : routes fermées, des centaines de gendarmes et CRS, hélicoptère dans les airs… (Voir les photos sur notre fil twitter). La route vers le Japon est secrète, mais il n’y a pas beaucoup de choix possibles. Le voyage devrait durer 2 à 3 mois.

A noter que, selon la télévision publique japonaise, la NHK, les mesures de sécurité renforcées sont dues à la présence d’une poignée de militants anti-nucléaire…

Jusqu’à maintenant, seulement quatre réacteurs ont utilisé du MOx au Japon, dont le n°3 de Fukushima daï-ichi et il était prévu de monter à 16 ou 18 réacteurs. Mais il n’y a que 5 réacteurs en activité actuellement. Comme nous l’avons déjà signalé, le gouvernement japonais aurait distribué plus de 16,2 milliards de yens (127 millions d’euros) en soutien aux pouvoirs locaux pour qu’ils acceptent l’utilisation du combustible MOx.

L’usine d’extraction du plutonium de Rokkashô-mura, dans la province d’Aomori, initialement prévue pour 1997 afin de prendre le relais des contrats étrangers, n’a jamais démarré. Sa date de mise en service a déjà été reportée 22 fois et son coût de construction devrait atteindre 2 900 milliards de yens (22,5 milliards d’euros), soit quatre fois plus que l’estimation initiale, selon Japan Nuclear Fuel Ltd (JNFL) citée par l’Asahi. La dernière augmentation de 750 milliards de yens (presque 6 milliards d’euros) serait due au renforcement de la résistance aux séismes. Si l’on inclut l’exploitation de l’usine pendant 40 ans et son démantèlement, la facture devrait s’élever à 13 900 milliards de yens (108 milliards d’euros).

Tout ça pourquoi ? En France, le MOx entraîne un taux de recyclage des combustibles qui sortent des réacteurs nucléaires inférieur à 1% (lire notre bilan). C’est quasiment 0% au Japon…

En attendant, le stock de combustibles usés s’accumule sans solution en vue au Japon, dans les piscines des centrales nucléaires, ainsi qu’à proximité de l’usine dite de retraitement. Il y a deux volcans dans les environs de Rokkashô, le Towada et le Hokkada. Une coulée pyroclastique a atteint Rokkashô dans le passé. En cas de nouvelle menace volcanique, JNFL n’a rien trouvé de mieux, que de proposer de déplacer les 3 000 tonnes de combustibles usés et autres matières et déchets nucléaires, mais personne ne sait où.

Contamination radioactive des poussières suite à l’incendie du mont Juman en zone de retour difficile

Le 29 avril dernier, un incendie de forêt s’était déclaré au Mont Juman (十万山), dans un territoire fortement contaminé et classé en zone dite de “retour difficile”. Il avait fallu 12 jours pour l’éteindre. Le feu s’était propagé vers Futaba et 75 hectares de forêt ont été détruits. Il n’y a pas eu de victime ni de blessé.

Pour rassurer les populations, les autorités avaient affirmé que l’incendie n’avait pas entraîné une augmentation significative du débit de dose ambiant. Mais les informations étaient très réduites sur la contamination des cendres et poussières qui peuvent être inhalées. Greenpeace Japon avait relevé quelques données qui montrent une augmentation de la contamination des poussières à Namié et dans les environs. Cela pourrait être attribué aux cendres radioactives.

Chikurin-sha, le laboratoire associatif créé avec le soutien de l’ACRO, avait rapidement mis en place une surveillance citoyenne de la contamination des poussières avec un système simple et accessible à tous qui consiste à étendre un linge dans une zone exposée. Ce projet avait été soutenu par plusieurs autres associations.

Chikurin a publié les résultats en japonais et devrait bientôt rencontrer les autorités de Fukushima. Une vidéo de présentation en japonais est aussi disponible. Sur la carte ci-dessous, on peut voir l’emplacement de la centrale accidentée en bas à gauche sur la côte, le site de l’incendie, marqué par une étoile, les stations de surveillance des poussières de la province de Fukushima (en jaune) et l’emplacement des linges exposés par Chikurin, en bleu. L’association, qui a aussi installé un préleveur de poussières, a effectué une surveillance plus étendue que les autorités.

Les résultats des des analyses sont rapportés dans ce document pour plusieurs stations de prélèvement. Il en ressort

  • que les préleveurs de poussière de la province de Fukushima ont enregistré une contamination de l’air allant jusqu’à 30 mBq/m3 le 12 mai ;
  • que Chikurin a mesuré à proximité jusqu’à 125 mBq par mètre carré de linge et par heure d’exposition. Une synthèse des valeurs maximales est sur la carte ci-dessous.

Comme on pouvait s’y attendre, l’incendie a donc entraîné une contamination significative des poussières qui ont pu être inhalées par les secours et les personnes vivant dans les environs. Bien évidemment, les autorités doivent mettre en place une politique de prévention des incendies de forêt, et renforcer les mesures de la contamination des masses d’air.