Contrôle de la cheminée de rejet

Les cheminées de rejet sont assez instables en cas de séisme et leur contamination très élevée. Il n’est donc pas facile de les démanteler, même avec des robots.

TEPCo a utilisé des drones pour faire des mesures de radioactivité au niveau de la cheminée commune aux réacteurs n°1 et 2. Quand elle a envoyé un drone dans la cheminée, elle s’est rendue compte qu’une barre empêchait l’engin de descendre plus bas qu’à 10-20 m sous l’embouchure. C’est assez incroyable que la compagnie ne savait pas que cette barre existait et qu’elle ne peut pas donner sa position plus précisément.

TEPCo n’a mis que deux images en ligne avec un commentaire laconique. Et aucun résultat de mesure de débit de dose n’est donné. La transparence progresse…

Des images des drones avaient été publiées en septembre dernier.

57ième versement financier pour TEPCo

TEPCo annonce avoir reçu le 57ième versement financier de la part de la structure gouvernementale de soutien qui lui avance de l’argent pour les indemnisations : 44,4 milliards de yens (400 millions d’euros). Cet argent est prêté sans intérêt.

TEPCo a déjà reçu un total de 6 523 milliards de yens (57,7 milliards d’euros) et cela ne suffira pas.

L’industrie nucléaire japonaise veut repartir comme si de rien n’était

Kyûshû Electric qui a deux réacteurs qui ont été autorisés à redémarrer à sa centrale de Sendaï, mais plus qu’un en service jusqu’en décembre, vient de lancer une nouvelle campagne pour relancer la consommation d’électricité ! Des spots publicitaires vont vanter les maisons toutes électriques l’an prochain. Selon l’agence Bloomberg, cela a déjà commencé sur Internet, en proposant des promotions sur les radiateurs ou climatiseurs électriques. Quand la situation était tendue, juste après la catastrophe à la centrale de Fukushima daï-ichi, le gouvernement et les exploitants avaient appelé à des économies pour protéger le climat… C’est fini, il faut vendre maintenant, comme avant la catastrophe, alors que la demande a fortement baissé.

A partir de décembre 2016, Kyûshû n’aura plus de réacteur nucléaire en fonctionnement et le gouverneur va être vigilant quant à leur nouveau redémarrage. Par ailleurs, leur cuve a été forgée par Japan Casting & Forging Corp. (JCFC), la compagnie qui a aussi forgé les cinq générateurs de vapeur à cause desquels EdF doit arrêter cinq réacteurs sur ordre de l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) afin de procéder à des contrôles.

La Japan Atomic Energy Agency envisage toujours de demander l’autorisation de redémarrer le petit surgénérateur expérimental Joyo suite à l’arrêt prochain de Monju. Il a été mis en service en 1977 dans la province d’Ibaraki. La France essaye de convaincre le Japon de participer au financement d’Astrid, le projet de surgénérateur qui doit faire ce que ni Superphénix, ni Monju n’ont réussi à faire, à savoir consommer tout ce qui a été classé comme recyclable, mais qui n’est pas recyclé.

A la centrale de Shika, exploitée par Hokuriku Electric, a été inondée par la pluie : le 28 septembre dernier, 6,6 m3 d’eau de pluie ont pénétré au rez-de-chaussée et dans les sous-sols du réacteur n°2. Un tableau électrique pour la lumière a disjoncté. Or, il y a des équipements important pour la sûreté dans les pièces inondées, dont des batteries de secours et un tableau électrique qui commande un système de refroidissement de secours. Il a plu jusqu’à 26 millimètres par heure ce jour là. Les plus “hauts standards de sûreté au monde” ne sont pas encore atteints !

Pendant ce temps là, Taiwan, qui n’a pas plus de ressources énergétiques que le Japon, vient de décider d’arrêter le nucléaire d’ici 2025, quand la centrale la plus récente aura atteint 40 ans et d’investir dans les énergies renouvelables.

Nouveaux problèmes pour les entreposages de déchets radioactifs

La décontamination devrait engendrer plus de 20 millions de mètres cubes de déchets radioactifs après incinération de la matière organique pour réduire les volumes. La seule solution proposée est un centre d’entreposage de 16 km2 tout autour de la centrale de Fukushima pour une durée de 30 ans. Après, qui vivra verra, car les problèmes sont sans fin.

Les propriétaires terriens rechignent toujours à vendre leurs terrains pour y mettre les déchets. Fin septembre 2016, selon les données officielles du ministère de l’environnement, seulement 379 propriétaires sur 2 360 avaient signé un contrat. Cela représente une surface de 144 ha, soit environ 9% du projet total.

La commune d’Ôkuma, presque entièrement classée en zone de “retour difficile”, envisage donc d’offrir tous les terrains municipaux pour y mettre les déchets. Cela représente 95 hectares, ou environ 10% des terrains envisagés dans la commune. Cela comprend les écoles, le parc Fureai avec des terrains de sport… La commune n’a pas encore décidé si elle vendrait ou louerait ses terrains.

En attendant, c’est un village à l’abandon :

OkumaLa ligne de chemin de fer Jôban a été partiellement détruite par le tsunami, comme ici à Tomioka :

gare_TomiokaCertaines portions ont rouvert, mais pas dans les territoires les plus contaminés, entre Tatsuta et Namié. Japan Railway veut rouvrir entièrement la ligne avant 2020 en évitant le littoral. La décontamination devrait engendrer 300 000 m3 de déchets radioactifs. Les sacs sont le long de la ligne, mais il faudra les éloigner. Le ministère de l’environnement négocie avec des propriétaires de terrains proches de la voie, mais cela ne suffira pas car peu ont répondu favorablement. Alors, c’est un jeu de chaises musicales qui est envisagé : utiliser les terrains où il y a déchets actuellement après qu’ils aient été libérés par le transfert vers le centre d’entreposage situé autour de la centrale de Fukushima daï-ichi…

En attendant, les déchets s’amoncellent un peu partout :

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Cet entreposage n’était pas prévu durer aussi longtemps, ce qui n’est pas sans poser de problème car les sacs ne tiennent pas. Ici, à Tomioka, les herbes repoussent :

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L’équivalent de la Cour des comptes du Japon est allée inspecter certains de ces sites et a découvert d’autres problèmes, selon l’Asahi. Ceux qui accueillent de la terre contaminée, sont surélevés au centre pour que l’eau s’écoule sur les bords où elle peut être récoltée et contrôlée car les sacs ne sont pas étanches. Il y en a jusqu’à 5 niveaux. Avec le temps et le poids des déchets, c’est un creux qui peut apparaître au centre, et l’eau contaminée s’y accumuler. La surveillance est alors difficile, voire impossible. Voir le schéma du Asahi :

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Le problème pourrait affecter 31 sites sur les 34 inspectés. Il y en a 106 dans la province de Fukushima. Il y en a 15 à Kawamata, 5 à Namié, 4 à Tamura, 4 à Iitaté et 3 à Naraha.

Il n’est pas normal que l’Autorité de Régulation Nucléaire, la NRA, ne contrôle pas ces entreposages de déchets radioactifs.

En ce qui concerne les déchets issus du démantèlement des centrales nucléaires, la NRA veut enfouir les plus contaminés à moins 70 mètres pour 100 000 ans. Il s’agit essentiellement des barres de contrôle des réacteurs. Les compagnies d’électricité en aurait la responsabilité pendant 300 à 400 ans. Elles n’ont pas encore trouvé les sites… Lire l’Asahi pour en savoir plus.

Le gouvernement compte sur la décroissance radioactive pour que ces déchets passent sous la barre des 8 000 Bq/kg pour être déclassés et réutilisés… Cette limite était de 100 Bq/kg pour le césium 137 avant la catastrophe.

Niigata : un opposant au nucléaire devient gouverneur

C’est Ryûichi Yoneyama, soutenu par les partis situés à la gauche de la majorité gouvernementale, très critique envers l’industrie nucléaire, qui a remporté l’élection au poste de gouverneur de Niigata où TEPCo espère redémarrer sa centrale de Kashiwazaki-Kariwa. Il y avait 4 candidats en lice et c’était sa cinquième tentative.

Comme son prédécesseur, qui avait renoncé à se présenter, il n’autorisera le redémarrage des réacteurs que quand toute la lumière aura été faite sur l’accident à la centrale de Fukushima daï-ichi. Il demande aussi une révision des plans d’urgence afin de protéger la population en cas d’accident grave. Il est en poste pour 4 ans.

De toutes façons, TEPCo n’est pas prête car elle a sous-estimé le risque de liquéfaction des sols en cas de séisme. Mais, ce résultat est un coup dur pour le gouvernement, qui s’était investi dans cette campagne, et TEPCo, car cela montre que les électeurs ne sont pas en phase avec leur politique énergétique. Le taux de participation est passé de 43,95% lors de la précédente élection à 53,05% cette fois-ci, à cause de l’enjeu du nucléaire. A Kagoshima aussi, un nouveau gouverneur avait été élu grâce à son positionnement très critique face au nucléaire.

Selon un sondage effectué à la sortie des urnes par la NHK, 73% des électeurs de Niigata s’opposent au redémarrage de la centrale.

Le nouveau gouverneur n’a pas la majorité de l’assemblée régionale, puisque seulement 3 élus sur 53 appartiennent à des partis qui l’ont officiellement soutenu. Il va donc devoir négocier pour gérer la province. Le ministre de l’industrie, qui n’a pas l’intention de changer de politique, a aussitôt expliqué qu’il espérait obtenir la compréhension du gouverneur à propos du redémarrage de la centrale de Kashiwazaki-Kariwa. Les pressions vont donc être fortes.

Statistiques sur les doses prises par les travailleurs à la centrale de Fukushima daï-ichi

TEPCo a mis en ligne ses dernières données concernant les doses prises par les travailleurs à la centrale de Fukushima daï-ichi. Rappelons que la compagnie a remis à zéro tous ses compteurs en avril dernier et que cela ne semble pas troubler les autorités japonaises.

9 323 personnes ont travaillé à la centrale accidentée en août 2016, dont 8 317 sous-traitants. Elles sont 12 787 depuis le 1er avril 2016, dont 11 315 sous-traitants. On ne sait pas combien d’entre elles ont déjà été exposées avant.

Les doses moyennes et maximales prises en août 2016 sont inférieures à celles prises les mois précédents, mais ce sont toujours les sous-traitants qui prennent les doses les plus fortes. La dose moyenne prise sur 5 mois, entre le 1er avril 2016 et le 31 août, dépasse le millisievert, dose maximale admissible sur un an pour la population. La dose maximale sur cette même période est de 35,71 mSv. C’est plus que la dose moyenne tolérée sur un an, qui est de 20 mSv (100 mSv sur 5 ans).

Le documents de TEPCo donne aussi les doses à la peau et à l’œil.

Quel avenir pour la centrale de Kashiwazaki-Kariwa ?

La centrale de Kashiwazaki-Kariwa, propriété de TEPCo dans la province de Niigata, sur la mer du Japon, est la plus puissante au monde avec ses 7 réacteurs. Quand elle marche… Les réacteurs n°2, 3 et 4 sont arrêtés depuis le séisme de 2007. Les réacteurs n°1, 5, 6 et 7 avaient été remis en service avant d’être à nouveau arrêtés en mars 2011 après le séisme du Tôhoku.

TEPCo compte sur un redémarrage pour se refaire une santé financière, mais ce n’est pas gagné. Le gouverneur y est opposé, mais il sera remplacé lors de l’élection du 16 octobre prochain car il a décidé de ne plus se représenter. Parmi les candidats en lice pour le remplacer, deux sont au coude à coude : R. Yonéyama, soutenu par tous les partis à la gauche des partis de gouvernement. Il a promis de continuer la politique du gouverneur sortant en matière de nucléaire. Il est âgé de 49 ans et a déjà essuyé quatre échecs pour ce poste. T. Mori, soutenu par le gouvernement, est plus favorable à TEPCo, même s’il évite le thème du nucléaire dans sa campagne. Il affirme que la sûreté est sa priorité et parle d’énergies renouvelables.

Mais, quel que soit le résultat de l’élection à venir, TEPCo est à la peine avec ses réacteurs. Elle voulait redémarrer en priorité les réacteurs n°6 et 7, qui sont les plus récents. Selon le Maïnichi, elle vient d’annoncer à l’Autorité de régulation nucléaire (NRA), la NRA, qu’elle va revoir ses plans à propos de ces réacteurs alors que les inspections sont presque terminées. C’est lié à un risque de liquéfaction du sol (lire aussi en anglais sur Wikipedia).

Explications. Les réacteurs 1 à 4 sont à 5 m au-dessus du niveau de la mer et les réacteurs 5 à 7, à 12 m. La hauteur maximale de tsunami calculée par TEPCo est de 7,6 m. La compagnie a donc construit une digue de 15 de haut par rapport au niveau de la mer pour protéger sa centrale. Mais en cas de liquéfaction du sol, comme cela a été observé lors du séisme de 2007, la digue ne pourrait pas tenir et les réacteurs 1 à 4 pourraient être inondés. C’est ce qui ressort de l’analyse faite par TEPCo sur demande de la NRA.

Or TEPCo a prévu d’utiliser le réacteur n°3 comme centre d’urgence en cas d’accident. Le bâtiment anti-sismique qui devait servir de poste de secours est aussi situé à proximité des réacteurs 1 à 4. Ce n’est plus possible s’ils risquent d’être inondés.

TEPCo veut donc se rabattre sur le réacteur n°5 pour y installer le centre d’urgence et espère obtenir l’aval de la NRA. Mais, il n’est qu’à 130 m du réacteur n°6 et le débit de dose pourrait y être trop élevé en cas d’accident grave, jusqu’à 70 mSv en une semaine.

Ce n’est que maintenant que la compagnie se rend compte du problème, alors qu’elle ne cesse d’affirmer que la sûreté est sa priorité n°1. Rappelons que cette centrale avait été fortement secouée en 2007 et que le phénomène de liquéfaction du sol avait alors été observé.

TEPCo espérait que les réacteurs n°6 et 7 soient les premiers réacteurs à eau bouillante du pays à être remis en service après la catastrophe de Fukushima… Et elle n’a pas renoncé à redémarrer un jour les réacteurs n°1 à 4, tout comme elle n’a pas renoncé aux réacteurs de Fukushima daï-ni. Quel crédit donner à sa politique énergétique ?

La terre abandonnée

Le documentaire, La terre abandonnée, est sorti en Belgique. Il s’intéresse aux personnes qui sont restées à Tomioka ou qui ont choisi d’y revenir, malgré l’ordre d’évacuation. Voir la bande annonce.

Le réalisateur, Gilles Laurent, est décédé dans l’attentat de la station Maelbeek à Bruxelles le 22 mars 2016. Lire le portrait que lui consacre Le Soir.

Pour en savoir plus sur le film et sa diffusion, c’est ici.

La terre abandonnée
Un film de Gilles Laurent – 73′ – 2016 – Film d’auteur – CVB

Dans la zone évacuée autour de la centrale nucléaire de Fukushima, quelques rares individus vivent sur cette terre brûlante de radiations. Rythmé par les travaux de décontamination et le danger permanent, l’existence apparemment déraisonnable mais paisible de ces irréductibles nous rappelle qu’un bout de terre est, en dernier recours, notre lien le plus sûr au monde.

 

France : le ministère de l’intérieur élargit les PPI autour des centrales nucléaires

Selon Actu-environnement, le ministre de l’Intérieur a adressé le 3 octobre aux préfets une instruction présentant les évolutions de la doctrine nationale en matière d’accident nucléaire majeur qui doivent être intégrés par les préfets dans les plans particuliers d’intervention (PPI). La circulaire est disponible en ligne ici.

Quatre nouvelles mesures ont été adoptées par le gouvernement :

  1. Etendre les PPI et la distribution d’iode stable à 20 km autour des centrales nucléaires.
  2. Préparer une évacuation immédiate dans un rayon de 5 km.
  3. Prendre une consigne d’interdiction de consommation de denrées alimentaires dès la phase d’urgence.
  4. Tenir compte du contexte local, sans plus de précisions.

Les nouvelles instructions pour rédiger les nouveaux PPI seront envoyées début 2017, selon la circulaire. On n’en sait pas plus non plus sur le calendrier d’extension de la distribution de l’iode à 20 km. La circulaire précise que ce sera fait une fois la distribution dans un rayon de 10 km terminée, sans plus.

C’est un progrès timide, mais l’étude de l’ACRO pour l’ANCCLI à propos des plans d’urgence reste d’actualité. On aurait espéré que le ministère dise qu’il faut se préparer à évacuer jusqu’à 20 km comme le recommandent les autorités de sûreté nucléaire et celles compétentes en radioprotection en Europe dans leur rapport ATHLET. Rien ne semble changé au-delà des 20 km pour la protection de la thyroïde et la mise à l’abri. Ce même rapport préconise pourtant de se préparer à protéger les populations jusqu’à 100 km.

Et puis, les personnes vulnérables, comme les malades dans les hôpitaux, courent le plus de risque en cas d’urgence nucléaire. Leur vie peut être en danger. Rien dans la circulaire à ce propos.

La concertation avec les parties-prenantes et les populations concernées ne semble toujours pas à l’ordre du jour, ni l’évaluation scientifique des mesures de protection, comme le calcul des temps d’évacuation. C’est obligatoire aux Etats-Unis.

Contrairement à ce que prétend la circulaire, les leçons de la catastrophe nucléaire de Fukushima n’ont pas encore été tirées.